Archives mensuelles : mars 2014

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Une étude intégrale du roman de Didier Daeninckx, « Cannibale »

 

 

Titre : Une étude intégrale du roman de Didier Daeninckx, Cannibale.

Un roman ou un réquisitoire ?

 Carole Guérin-Callebout, professeur au collège Mendès France, Tourcoing

 

Niveau : Collège, 3ème

Objet d’étude, thème du programme :

Cette séquence se propose de répondre à une des entrées du programme de 3ème : Formes du récit au XXème et XXIème siècle. Plus précisément, la séquence s’appuie sur l’étude d’un roman de Didier Daeninckx porteur « d’un regard sur l’histoire et le monde contemporain. »

Le choix de cette œuvre repose sur la volonté de créer des repères culturels chez les élèves à partir d’un roman à la fois accessible et complexe, à la trame narrative aisément identifiable, mais éminemment polysémique.

 Le thème retenu est celui du regard porté sur l’autre, mais aussi sur soi. C’est à partir de celui-ci et en étudiant les rapports de l’homme et de la société, que les notions d’humanité et d’engagement seront questionnées. Plus largement, c’est un topos de la littérature et de la culture que les élèves seront amenés à interroger à travers la confrontation entre ce roman, des textes complémentaires et des représentations artistiques.

Tout l’enjeu de la lecture intégrale est de construire un projet qui actualise le sens de l’œuvre au service de son interprétation, tout en éveillant la curiosité des élèves et en les rendant vraiment acteur du parcours d’étude. Dans cette perspective, deux priorités ont été fixées :

  • Soigner la rencontre avec l’œuvre, puis accompagner et guider la lecture cursive : la création et l’exploitation d’un carnet de lecture s’avère ici très efficace.
  • Engager les élèves dans une relecture réflexive du roman : l’objectif est d’inviter les élèves à interroger les enjeux du roman à travers l’étude lexicale complète d’un de ces mots clés, le mot « cannibale ».

 

Objectifs généraux du projet :

lecture

 –Un texte ouvroir pour lancer l’étude de l’œuvre intégrale : la nouvelle de Patricia Highsmith, « Carnet d’un respectable cancrelat », extraite du recueil Le rat de Venise– Le roman de Didier Daeninckx, étudié en œuvre intégrale, CannibaleDes textes complémentaires pour enrichir le débat sur l’œuvre :un extrait du roman de René Maran, Batouala, p. 176 et 177 de l’anthologie itinéraires humanistes pour notre temps ;le discours de Robert Badinter, « Discours à l’Assemblée nationale sur l’abolition de la peine de mort », p. 148 et 149 de l’anthologie ;des extraits du film Elephant Man de David Lynch (1980)

culture humaniste / histoire des arts

La photographie : un art au service des hommes ?Une réflexion sur l’art de la photographie à travers la confrontation de clichés des peuples autochtones depuis les débuts de la colonisation jusqu’aux travaux de Lévi-Strauss.Ce travail, réalisé dans le cadre de la thématique Art-Etat-Pouvoir, interroge justement les relations entre cet art et le pouvoir : les clichés pris sont-ils au service du pouvoir colonial, des puissants ou invitent-ils au contraire à le dénoncer en apprenant à apprécier l’altérité ? Plus largement, ce travail permet d’approfondir la thématique du monstre qui a largement inspiré les artistes.

Types d’écrits travaillés

Des écrits fonctionnels : écrits de travail et écrits de synthèse pour répondre à la problématique posée.Un écrit fictionnel sous forme d’un discours: Et si, comme Robert Badinter (dans son discours à l’assemblée nationale sur l’abolition de la peine de mort), Gocéné avait l’opportunité de se retrouver à l’assemblée nationale pour défendre la cause de tous les siens et demander l’abolition de toute forme de colonialisme, que dirait-il ?

langue

-Un travail sur la grammaire du discours et la modalisation : le conditionnel et le subjonctif au service de l’expression de sa pensée.- les subordonnées de condition, de concession et de d’opposition- le lexique de l’indignation

oral

 Entraînement à l’oral d’Histoire des Arts. De nombreux débats interprétatifs en classe

 

 

Utilisation des TICE :

Utilisation du TNI au service des lectures des textes

Exploitation des ressources numériques en ligne pour aider les élèves à mieux écrire (dictionnaires électroniques…)

Quelques séances en salle pupitre en particulier pour travailler l’Histoire des Arts en allant observer les images et vidéos à disposition sur le web

Travail en lien avec l’ENT pour enrichir l’espace numérique de la classe avec la mise en ligne des travaux des élèves et en particulier une valorisation de l’expression orale avec des enregistrements des discours via le logiciel Audacity.

 

-NB : toutes les références de pages données le seront dans l’édition folio-

 

Présentation synthétique de la séquence  puis détail de l’activité et/ou de la séance proposée :

Plan synthétique de la séquence, Une étude intégrale du roman de Didier Daeninckx

« Cannibale »

Les premières séances de la séquence ont pour but de créer un horizon d’attente suffisamment riche pour que les élèves aient envie de lire le roman, et conduisent ensuite cette lecture sans difficulté. La place des activités augurales est essentielle pour créer une véritable communauté de lecteurs prête à s’engager dans le parcours d’étude du roman.  
Séance 1 : la rencontre avec le roman La rencontre avec le roman va se faire en deux temps lors d’une séance décrochée pendant la séquence précédant celle-ci:

  • Elle débute par la découverte d’une nouvelle, à la manière d’un texte « ouvroir » qui va lancer la séquence. L’objectif est de créer un point d’ancrage à la lecture à venir en lançant un débat qui servira de base de questionnement tout au long de l’étude : qu’est-ce qu’être un homme? Qu’est-ce qu’être un animal?

La nouvelle se présente en effet comme le journal écrit, depuis son hôtel, par un cancrelat fin lettré et féru de culture qui porte un regard acerbe sur les hommes et leurs agissements.

  • Le roman est alors introduit (il a été préalablement acheté par les élèves, mais il peut aussi avoir été distribué si une série de livres est disponible dans le collège) avec en parallèle la distribution d’un carnet de lecture.

La lecture des premières pages du roman (pages 11 à 20) associée à l’examen des documents iconographiques (vidéo-projetés) du carnet de lecture permettent d’achever la contextualisation historique, géographique et socio-politique de l’œuvre.

Les élèves sont prêts à lire le roman en se laissant guider par leur carnet de lecture.

Deux exploitations possibles :

-Tous les élèves le réalisent dans son intégralité

-Une démarche de différenciation pédagogique est mise en œuvre en demandant aux élèves les plus en difficulté de répondre aux questions posées (dans l’ordre de la lecture) et de les inviter à réaliser le bilan et aux élèves les plus autonomes de ne répondre qu’aux deux questions de synthèse de la dernière page.

Les élèves disposent de quinze jours pour lire le roman, le temps d’achever la séquence précédente.

Séance 2 : séance à dominante lexicale/ problématiser le parcours d’étude Cette séance (expliquée dans le détail de son déroulement ci-dessous) a pour but de problématiser l’étude à venir à partir d’une discussion collective, menée à partir de l’étude du verbe « coloniser ». Elle débute par une activité de recherche lexicale et de réflexion sur l’usage des dictionnaires électroniques en salle pupitre, débouchant sur la rédaction d’une définition personnelle du verbe coloniser.Elle se poursuit avec un débat mené en classe pour comprendre l’écart entre cette définition et celle donnée dans le livre, dans la bouche de « l’adjoint du gouverneur » et s’interroger ainsi sur les intentions de l’auteur. La séance se clôt par la construction de la problématique d’étude du roman :

Quel regard sur le monde le roman dénonce-t-il? Et dans quelle mesure l’écriture du roman peut servir l’engagement ?

La seconde partie de la séquence est essentiellement consacrée à la construction du parcours de lecture intégrale du roman de Didier Daeninckx
Séance 3 : séance de lecture analytique Lecture analytique de l’extrait n°1 : La mort des crocodiles (p. 25 à 27) (p. 25 dès le début  jusqu’au début pages 27, passage en italique compris ; ce qui permet de comprendre la construction narrative et de saisir toute la profondeur et la visée du récit). La lecture est enrichie par la mise en parallèle du rêve de Gocéné (p. 47) et s’achève par la rédaction par les élèves d’un portrait du personnage principal :Pourquoi peut-on dire de lui qu’il est un personnage charismatique ? Peut-on le qualifier de résistant et au service de quelle cause ? Cet écrit permet ainsi de donner plus d’ampleur là la lecture analytique en invitant les élèves à faire résonner le texte étudié à la lumière de l’ensemble du roman.
Séance 4 : séance de lecture analytique Lecture analytique n°2, une lecture comparée de deux extraits : Un nouveau monde. Cette lecture a pour but de porter un regard réflexif sur les pages du roman consacrées à la découverte de Paris par les Kanaks : l’entrée de la ville, p.41 : « Une jungle de pierre….quand un groupe de fêtards s’est annoncé en braillant. » et la description de la gare de l’Est, p.70 et p. 71 (haut de la page): « Des totems à figure de femmes……pour essayer de comprendre dans quel monde nous étions tombés. »Il s’agit d’un Paris métamorphosé par la métaphore filée, vu par « l’autre ». Ces pages interrogent ainsi la manière dont on voit l’autre et dont l’autre nous voit et offrent des premiers éléments de réponse à la problématique.
Séance 5 : séance d’Histoire des Arts Cette séance poursuit la réflexion lancée sur le regard de l’autre lors de la séance précédente en convoquant cette fois-ci le regard des artistes.La séance s’appuie sur quelques extraits du film Elephant Man qui progressivement invite à renverser la perspective.Elle se poursuit par un travail de comparaison entre des photographies prises pendant l’exposition coloniale de 1931 et celles prises plus tard par Claude Lévi-Strauss. Ces photographies permettent d’analyser l’évolution du regard sur l’autre et comprendre plus largement comment les arts contribuent à forger notre vision de nous-mêmes, des autres et du monde.
Séance 6 : séance de lecture analytique Séance de lecture analytique n°3 : La rencontre de Fofana/ (p 76 : « Entrez par ici… » à p. 81 : « On ne te remerciera jamais assez pour ton geste, Fofana. ») Cet extrait permet de mettre en lumière une autre histoire coloniale tragique, celle du sort réservé aux anciens tirailleurs sénégalais.Elle permet de dresser de nombreux parallèles entre le personnage de Gocéné et celui de Fofana et ainsi de comprendre comment la construction romanesque de ces personnages sert l’engagement de l’auteur.
Séance 7 : séance de lecture analytique ance de lecture analytique n°4 : Le face à face entre Albert Pontevigne et Gocéné (p. 76-77).Cette dernière lecture analytique clôt le parcours et offre les derniers éléments de réponse à la problématique en étudiant les différents procédés qui transforme progressivement Albert Pontevigne en barbare.
Séance 8 : séance d’écriture L’objectif est de s’assurer que les élèves ont bien compris le roman et de leur donner l’occasion de se l’approprier totalement à travers l’écriture. La séance débute par la lecture du discours de Robert Badinter (p. 148-149 de l’anthologie) pour en analyser les idées, la structure et les différents procédés de modalisation.Dans un second temps, les élèves sont invités à écrire le discours de Gocéné demandant l’abolition de la colonisation, en exploitant tous les procédés de l’indignation et en reprenant les différentes idées débattues à travers le parcours.
Séance 9 : bilan de la séquence Au terme de la séquence, chaque élève est invité à poster un commentaire pour donner un avis argumenté sur ce roman accompagné d’une citation voire d’un passage jugé particulièrement pertinent, révélateur, marquant et/ou choquant.

 

Une séance de lexique : savoir questionner le sens des mots pour parvenir à problématiser l’étude d’une œuvre

 

L’activité lexicale va constituer ici le moyen d’entrer dans la relecture de l’œuvre. L’objectif est d’en faire le levier pour renouveler le regard que les élèves portent sur le roman après validation de la lecture cursive :

            1-  Quel sens donner au verbe « coloniser »? Comment construire une définition?

            2- Comment aider les élèves à développer une posture réflexive  face à la pluralité des ressources numériques à disposition?

            3- Comment exploiter les définitions d’un mot? Comment s’en servir pour construire le projet de relecture du roman?

 

  • Première étape : définir le mot coloniser

Le premier travail a pour but de parvenir à une définition du mot en s’appuyant sur une exploitation de dictionnaires électroniques. En salle pupitre, les élèves vont chercher un document de travail dans le dossier commun de la classe. Chacun le complète personnellement.

Pour tenir compte de la diversité des profils de la classe, un contrat minimal est donné visant à fixer les savoirs fondamentaux. Chacun doit parvenir à reformuler personnellement le sens du verbe, en s’appuyant sur la famille du mot.

L’objectif de l’activité est double :

–          apprendre aux élèves à construire une définition avec rigueur, précision et clarté

–          permettre aux élèves de s’interroger véritablement sur le sens des mots grâce au travail de reformulation et de synthèse des différentes sources

  • Deuxième étape : développer réflexion et esprit critique

L’objectif est de faire en sorte que les élèves dressent un bilan de la première activité proposée en comparant les différents dictionnaires électroniques exploités. Chacun s’appuie sur ses propres recherches.

C’est cette activité de comparaison qui va préparer les élèves à développer une nouvelle posture réflexive.

Il s’agit ensuite de mutualiser les travaux pour aboutir à une définition commune du verbe « coloniser ». Les élèves convoquent synonymes, antonymes, famille du mot comme autant d’indices pertinents pour faire avancer le débat et parvenir à une définition négociée collectivement.

 

  • Troisième étape : problématiser une lecture en s’appuyant sur le sens d’un mot et ses emplois

Il s’agit de dresser un bilan complet en reprenant la définition du verbe « coloniser » issue de la négociation collective et de la confronter à la définition présente dans le roman, délivrée par l’adjoint du gouverneur.

Cette confrontation va permette d’interroger le roman : que peut nous apporter la lecture de ce roman? Quelles peuvent être les intentions de l’écrivain?

Pour faciliter le débat, un document de synthèse est vidéo-projeté, reprenant quelques éléments de réponses trouvés par les élèves dans la phase de recherche initiale.

Les élèves sont invités à analyser les valeurs associées au mot selon le contexte dans lequel il est employé.  Ce travail d’analyse est enrichi par l’apport de documents iconographiques (contexte d’époque et images de l’autre) et surtout par la lecture de l’extrait du roman de René Maran.

Dans ce roman en effet, le narrateur est un « colonisé » et permet d’envisager de « l’intérieur » les ravages de la colonisation.

Les élèves sont invités à rendre compte de leur compréhension globale de l’extrait pour détailler le contexte de la rencontre entre Batouala et les « maudits Blancs ». Il s’agit ensuite de les amener à interroger les conséquences de cette rencontre : tristesse, soumission et anéantissement de toute culture « par tout le pays noir ». Tout l’intérêt est de mettre ce texte en regard du roman de Daeninckx en demandant aux élèves ce que représente la danse pour les colonisés, à la lumière du texte de Maran et pour les colonisateurs, à la lumière des ordres donnés par le gouverneur lors de l’exposition coloniale dépeinte par Daeninckx.

  • Bilan et réinvestissement

La lecture de ce texte conduit donc les élèves à appréhender la tragédie de la colonisation et leur permet, dans une ultime étape, de poser les questions qui vont accompagner l’étude du roman :

–          un roman engagé?

–          un roman ou un réquisitoire?

–         un roman qui porte un regard sur l’homme ou sur la barbarie?

L’étude peut commencer…

 

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Bilan : compétences mobilisées au cours des différentes activités du projet

L’ensemble des compétences du socle seront travaillées au cours de la séquence et plus particulièrement les compétences 1 et 5 : la maîtrise de la langue française et l’acquisition d’une culture humaniste.

 

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Comment rester Homme ?

Comment rester Homme ?

Projet Itinéraire humaniste en lycée

Niveau : 1STMG

 Mme Deschamps

 Lycée Camille Desmoulins, Le Cateau-Cambrésis

 Objectif = Construire un itinéraire humaniste, en lien avec deux Objets d’Etude du programme de lycée : « Théâtre, texte et représentation » et « la Question de l’Homme dans les genres de l’argumentation »

Œuvre étudiée : Montserrat  d’Emmanuel Robles

Précision : Il s’agit ici de croiser deux objets d’étude, la question de l’Homme dans les genres de l’argumentation et le théâtre, texte et représentation (sachant que les élèves ont déjà travaillé en première séquence de l’année un groupement de textes intitulé « Quand le monstre s’infiltre dans l’Homme »  et ont donc déjà des notions sur la monstruosité et l’argumentation).

L’enjeu de cette séquence est de montrer aux élèves comment l’opposition avec le monstre permet de construire le héros, et pourquoi la théâtralité, en ce qu’elle montre  la violence, permet de révéler les étapes de construction du héros. En creux, à travers cette construction du héros, se révèlent bien évidemment des interrogations autour de l’Humanité, la lutte, le sacrifice : à savoir pour quelles valeurs humaines on accepte de vivre… jusqu’à en mourir (partie « Rester humain » de l’anthologie).

– amener les élèves  à  être réfléchir à la notion d’Humanité : pourquoi faut-il choisir de rester Homme jusqu’au bout, même s’il s’agit du choix le plus désespéré ?

Problématique : Montserrat, la « chance de l’Homme » ?

lecture

– 4 LA : I,2 ; I,7 ; II,1 ; III,9– 1 lecture cursive : Karen Blixen, Les Fils de Rois. (Il s’agit d’une nouvelle, le but étant de montrer que la théâtralité n’est pas présente seulement dans le genre théâtral)

culture humaniste / histoire des arts

– Etude du tableau de Goya, Tres de Mayo / Jaume Plensa, We, p 22 de l’anthologie– Héros et Humanité.

Types d’écrits travaillés

 

2 écrits sommatifs: 1 bac blanc sur la liberté / 1 sujet de dissertation (Pensez-vous que les auteurs sont à même de guider les hommes dans le monde ?)1 écrit d’invention de début de séquence : Vous écrirez le monologue d’un personnage (fictif ou réel) qui va dénoncer l’oppression militaire qu’il a subie. Vous ferez attention à utiliser des images et symboles permettant de rendre son indignation plus sensible

 

Plusieurs questions permettant de travailler l’entretien (à travailler en classe à l’oral ou bien à l’écrit à la maison) :1. En quoi la théâtralité permet-elle de souligner l’héroïsme ? (travail en classe)2. pour vous, quel serait le héros des temps modernes ? Avec photo et argumentation fondée sur les caractéristiques du héros (travail à l’écrit)3. Pourquoi Izquierdo peut-il être également considéré comme un héros ? En quoi le monstre est-il le « double » du héros ? (réutilisation de la sqce

 

1). Travail en classe:  Comment expliquez-vous la formule de G-A. Astre, « Montserrat, ou la chance de l’Homme » à partir de l’œuvre de Jaume Plensa, We. Travail de synthèse en classe

 

 

 

Au préalable, la classe a travaillé sur une séquence intitulée « Quand le monstre s’infiltre en l’Homme », dans le cadre de l’Objet d’Etude « La Question de l’Homme dans les genres de l’argumentation ».

Il s’agissait d’un groupement de textes. Deux œuvres intégrales ont également été lues :

–        Claude Gueux de Victor Hugo / La Mère aux monstres de Maupassant

 

En prolongement  ou en cours de séquence et selon le projet du professeur on convoquera un texte de l’anthologie p: 137 : VÁCLAV  HAVEL :  « La grande  Roue «  .

En effet dans cette pièce où règnent le mensonge, la trahison, le double langage  on proposera aux élèves de lire le texte puis en s’interrogeant sur la situation des protagonistes  de répondre à la question suivante:

Comment comprenez vous les paroles de Max et la décision qu’il prend face à Tourmakoff :

Max:

 « Autrement dit : la seule solution correcte , digne d’un homme vrai , c’est de regrader la vie en face , d’affronter avec courage les tempêtes et les vagues, de ne pas craindre de se salir les mains ni de s’avilir en déjouant les pièges tendus sur les chemins de l’humanité, de se jeter corps et âme dans la lutte finale pour une vie meilleure! »

Tourmakoff:

« Vous êtes  un homme , Max , un vrai! Bravo ! Je suis extrémement touché ….

Tourmakoff tend la main à maxence, ce qui n’est pas chose facile parce que Max a toujours les menottes . ils se serrent les mains . puis Tourmakoff sort du tiroir une feuille , une plume et les dispose solennellement devant Max 

Signez là s’il vous plaît….

Plan synthétique de la séquence,  Montserrat, La Chance de l’Homme

 

Séance 1:  Séance d’histoire des Arts  : 3 supports

– clip de la chanson de Michel Berger, « Diego, libre dans sa tête » /

– video présentant Léo Ferre chantant « Les Anarchistes » /

– Goya, tres de mayo (première de couverture.

Comment dire la lutte contre l’oppression ? Comment les symboles, mis en scène dans un espace, donnent-ils accès à l’intériorité de personnages ne pouvant justement pas parler ?cf fiche : avec le zoom sur la démarche pour entrer dans la lecture analytique

Séance 2 : Séance de découverte de l’œuvre intégrale

Cette séance se déroule en deux temps. Il s’agit de partir à la découverte du personnage de Montserrat, traître ou héros.-

1er temps : analyse de la liste de présentation des personnages. Montserrat appartient au camp espagnol (officier espagnol). Pourquoi serait-il le héros de la pièce s’il participe à toutes les exactions commises ? Puis analyse de la didascalie initiale présentant le décor : un espace clos, ouvert exclusivement sur le pouvoir politique ou militaire espagnols. La valeur symbolique des objets (fenêtre, porte) – en lien avec la première séance – a été mise en évidence.

2ème temps : séance en salle pupitre : Montserrat, qui es-tu ? Les élèves ont travaillé par groupe. Le but de ce travail est de comprendre les raisons pour lesquelles Montserrat choisit de changer de camp, d’aider le peuple vénézuélien. L’intérêt de cette activité est de croiser les regards, et de montrer aux élèves qu’on apprend qui est Montserrat par ce qu’il dit, mais également grâce à ce que les autres disent de lui.

Puis temps de synthèse en classe :

il a été demandé aux élèves de réaliser un tableau de présence des personnages. Montserrat, lorsqu’il entre sur scène, n’en ressort plus, si ce n’est à la fin pour mourir (de même pour les 6 otages). Ainsi, l’espace de Montserrat se retourne contre lui, étant donné qu’en trahissant il change d’identité et devient un étranger, hostile. L’espace de la scène est donc mortifère.

La suite de cette séquence a pour but de montrer la dimension héroïque de Montserrat.

Séance 3 : lecture analytique de l’acte I, scène 2 Cette lecture analytique est centrée sur le personnage d’Izquierdo, l’officier espagnol concentrant en lui toutes les violences mortifères. Les élèves ont pu comprendre que ce personnage semait la violence autour de lui, et que véritablement il était habité par celle-ci. Le spectateur, avant même que Montserrat ne soit entré sur scène, est prêt à prendre parti contre Izquierdo, et donc pour Montserrat Cf fiche lecture analytique n°1

Séance 4 : séance de langueQu’est-ce que la théâtralité ?Les élèves ont recherché l’étymologique grecque et latine du mot « théâtre ». L’étymologie  thetraon – ou spectacle, a permis aux élèves  comprendre que le héros est celui que l’on voit, parce qu’il est à part, seul En ce sens, il est fort proche du « monstre » que l’on voit, précisément parce qu’il est différent. Le principe de cette pièce est de forcer à voir, à regarder celui qui ose s’affranchir du pouvoir espagnol. Montserrat ne commence à être vu qu’à partir du moment où il a trahi. Auparavant il fait partie de l’armée espagnole, et donc il n’est pas vu, il n’y a pas spectacle. Les éléments propres à la théâtralité ne servent qu’à souligner celui qui se met à part, à le faire voir, à le re-connaître.

Séance 5 : Lecture analytique de l’acte I, scène 7 En prolongement de la séance précédente, les élèves sont invités à observer les différents rôles qu’adopte Izquierdo. En effet, Izquierdo est celui qui adopte le rôle de metteur en scène, étant donné qu’il crée une torture en action, un huis-clos sadique, en choisissant 6 otages innocents, pour faire pression sur Montserrat, de façon à ce qu’il n’ait pas 6 morts sur la conscience. Izquierdo crée un Montserrat coupable et responsable de la mort de 6 innocents, en un sadisme fier de lui. L’identité de Monsterrat ne cesse d’osciller entre culpabilité et innocence, entre courage et cruauté. Voilà l’essence même du tragique.

Séance 6 : lecture transversale L’épreuve – et le risque de perte de son identité – comme étape nécessaire à la construction du héros.- Tout d’abord le générique de Superman 2 a été présenté aux élèves, qui ont ainsi pu déterminer un certain nombre de phases topiques : le combat contre les « méchants » – voire des doubles inversés -, le risque d’échouer, le monde qui est finalement sauvé , et enfin la métamorphose du héros en personnage aux qualités surhumaines acclamé et admiré de tous.- puis des extraits de « Ultima verba » et du combat de Tristan contre le Morholt ont été proposés aux élèves, qui ont repéré à nouveau ces différentes phases.

– enfin une synthèse a été réalisée par les élèves (sur video-projecteur) : elle indique ces phases dans la pièce Montserrat

– en bilan : le professeur a demandé aux élèves pourquoi le personnage de Mira dans Les fils de rois pouvait être considéré comme un héros

Séance 7 : séance de lecture analytique de l’acte III, scène 1 Il s’agit de comprendre en quoi consiste exactement la métamorphose de Montserrat. La lecture analytique a permis de révéler la dimension christique du personnage de Montserrat.

Séance 8 : séance de synthèse Les élèves ont été très sensibles à la difficulté de se situer face à Montserrat. Certes il veut sauver le peuple vénézuélien, mais est – même s’il n’est pas responsable – cause de la mort de 6 innocents. Les élèves, au cours de la pièce, ne pouvaient pas complètement adhérer au personnage de Montserrat. C’était alors l’occasion de revenir sur la définition même du héros tragique, ni coupable ni innocent, dont le spectacle provoque terreur et pitié ( préface de Phèdre de Racine) . Ce spectacle nous oblige à aller au bout de la logique de la torture. Les élèves, sans le savoir, ont fait l’épreuve de la catharsis, selon la définition d’Aristote.

PROLONGEMENT en aide personnalisée

Simultanément, 6 séances d’AP se sont insérées : il s’agissait de faire écrire les élèves sur Montserrat, de façon à faire vivre l’anthologie.

Comment nos élèves réagissent-ils face à Montserrat ?

Quelles réflexions sur l’Humanité des élèves de 16 ans ont-ils ?

Une certaine liberté  a été laissée aux élèves. Mais le professeur s’est rendu compte que les élèves n’osaient pas sortir du cadre de la lecture analytique, et n’osaient pas laisser libre cours à leur sensibilité. Pour les aider,  une pédagogie de détour s’imposait: : voici le parcours proposé :

1. le professeur a demandé aux élèves de réaliser un montage. A l’aide d’images – au choix des élèves – à eux de retranscrire comment ils se représentaient le personnage de Montserrat, son action, ainsi que l’univers dans lequel il évolue. Les élèves spontanément ont exploité la dimension symbolique étudiée lors de la première séance.

L'image permet de montrer la façon dont je vois Montserrat : comme un prisonnier désirant  être libre   Pour moi, Montserrat représente ….... -  un héros -  il symbolise des valeurs humaines et morales = liberté, fraternité, amitié -  il est courageux car il est face a un « monstre » : Izquierdo -  il est seul = solitude -  il est prêt à se sacrifier pour sa cause : liberté pour le peuple vénézuéliens et Bolivar

Commentaire d’un élève:

‘ Cette image permet de montrer la façon dont je vois Montserrat : comme un prisonnier désirant être libre
Pour moi, Montserrat représente …….
– l’héroïsme
– il symbolise des valeurs humaines et morales = liberté, fraternité, amitié
– il est courageux car il est face a un « monstre » : Izquierdo
– il est  seul
– il est prêt à se sacrifier pour sa cause :  la liberté pour le peuple vénézuéliens et Bolivar

 

 

2. Puis le professeur a demandé aux élèves  choisir un avatar – encore une fois au choix – qu’ils intègreraient à leur montage. A eux de déterminer où placer leur avatar : en Montserrat, loin de lui, en tant que spectateur, en tant que victime… Ce choix a permis de lancer la parole et de libérer les points de vue .

Montserrat est un soldat espagnol, qui pour sauver le peuple Vénézuélien a dû trahir son propre peuple. Mais dans l'ombre de cette trahison se cache un homme nommé Izquierdo, qui est prêt à tout pour pouvoir faire parler son nouvel ennemi: Montserrat.  Comment Montserrat parviendra t-il à rester muet et continuer sa « mission » jusqu'au bout, arrivera t-il à résister au terrible Izquierdo, ainsi qu'à sa torture psychologique ? Commentaire des choix: Pour nous la Colombe symbolise Montserrat car celle-ci représente la liberté, la paix, la force des sentiments et la pureté. Pour nous le Lion symbolise Izquierdo car celui-ci représente la méchanceté, la confiance en soi et la supériorité.  Pour nous l'image du fond représente la torture, le massacre des vénézuéliens par les Espagnols, ainsi que la mort. Lolita a choisi la Colombe (Montserrat) car elle se retrouve en Montserrat, elle est sentimentale, sensible, et aime se battre pour la liberté. (fusionnelle)  Camille a choisi le Lion (Izquierdo) car : Elle se retrouve en Izquierdo, elle aime avoir ce qu'elle veut à tout prix, impulsive, mêle-tout, et agressive. ( fusionnelle) Sofiane a choisi la neutralité car : Observateur

Montserrat est un soldat espagnol, qui pour

Commentaire des choix:

« Pour nous :
-la Colombe symbolise Montserrat car celle-ci représente la liberté, la paix, la force des sentiments et la pureté.
– le Lion symbolise Izquierdo car celui-ci représente la méchanceté, la confiance en soi et la supériorité.
– l’image du fond représente la torture, le massacre des vénézuéliens par les Espagnols, ainsi que la mort.
Lolita a choisi la Colombe (Montserrat) car elle se retrouve en Montserrat, elle est sentimentale, sensible, et aime se battre pour la liberté. ( posture fusionnelle)
Camille a choisi le Lion (Izquierdo) car : Elle se retrouve en Izquierdo, elle aime avoir ce qu’elle veut à tout prix, impulsive, mêle-tout, et agressive. (posture  fusionnelle)
Sofiane a choisi la neutralité car :  (posture d’observateur) »

 

3. Puis une « trame » a été proposée aux élèves, de façon à leur donner des « accroches ».

 

Pour vous aider dans votre travail d’écriture, voilà ce que je vous propose :

 

Vous allez vous fonder sur le  collage que vous avez réalisé la semaine dernière

 

– Vous allez écrire un texte qui aura pour appui, fondement, VOTRE point de vue, ce que VOUS voyez et  ressentes, votre ressenti, vos émotions, ce que vous voyez et percevez depuis la place que VOUS avez adoptée.

 

– Vous suivrez les étapes que je vous propose :

 

Moi, qui suis là, à cette place, à cet endroit…………………………….

Quand je te vois dans ce lieu…………………………………………….

Quand je te vois faire ceci ou cela………………………………………………………..

Quand je te vois affronter, te battre contre………………………………………………………..

Alors je ressens……………………………………………………………………………………..

 

4. Et voici quelques productions d’élèves

 

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Autour du mot « exil »

 Le Vocabulaire de l’exil

Véronique Perrin

Lycée Voltaire , Wingles

 Exercices pour les élèves 

  1. I. Quel est le mot mystère ?
  1. 1. Dans la  Bible, comment s’intitule le livre du Pentateuque qui relate la sortie d’E-gypte des Israélites ? 
  2. 2. Quelle est l’étymologie du mot que vous avez trouvé ?
  3. 3. Que signifie l’………. rural ?
  4. 4. Comment s’appelle la dernière partie d’une tragédie grecque qui, après la sortie du chœur, contenait le dénouement ?
  1. II. Le mot mystère contient un préfixe, dont vous donnerez la signification après avoir retrouvé deux autres mots l’employant, répondant aux définitions suivantes :
  1. 1. Qui réside dans une autre patrie que la sienne. 
  2. 2. Etat de celui que l’autorité force à vivre hors de son pays, ou qui s’y résout lui-même.  
  1. 3. Quelle forme se préfixe prend-il dans le mot qui correspond à la définition suivante :  quitter son pays pour aller se fixer dans un autre ? 

 

  1. III. Jouons avec les préfixes
  1. 1. Quelle est la différence entre un  expatrié, un apatride, un rapatrié ?
  2. 2. Quelle est la différence entre l’exogamie et l’endogamie ?
  3. 3. Quelle est la différence entre l’émigration et l’immigration ?
  4. 4. Quelle est la différence entre l’import et l’export ?
  5. 5. Quelle est la différence entre le déracinement et l’enracinement ?

 

  1. IV. D’un sens à l’autre

              Le mot étranger dérive du mot étrange. Quelle est leur  étymologie commune ? Comment 

             comprendre  cette association ?

 

  1. V. La famille de « ban »

En francique, le ban est la proclamation d’un ordre, une  loi dont la non-observance entraîne une peine. « Mettre quelqu’un au ban de la société », c’est l’exclure du groupe, l’en déclarer indigne. 

  1. 1. Quel mot de la même famille désigne l’action  de condamner quelqu’un à quitter une communauté nationale, un parti…?
  2. 2. Qu’est-ce qu’un forban ?

 

  1. VI. Que signifie le mot « extradition » ? Comment est-il formé ?

 

 

1  VII. Culture générale

 Que vient donc faire cette coquille d’huître ?                    Sans titre

Vous saurez expliquer sa présence quand vous saurez définir ce qu’est l’ostracisme et que vous connaîtrez l’histoire de ce mot.

Le Vocabulaire de l’exil – Corrigé

  1. I. L’exercice  I permet de travailler autour du mot « exode » et de donner un peu de culture générale : L’Exode, titre du livre biblique ; l’exodos, dans la tragédie grecque.
  1. II. L’exercice  II  sensibilise à la formation du lexique avec  la présence du  préfixe « ex » dans expatrié  (du grec exo, « en dehors de »  et de patrida, « pays ») et exil (du latin ex(s)ilium, venant de ex(s) ul, signifiant « séjournant à l’étranger, banni ou de ex(s)ilere, « sauter dehors ».  Les élèves peuvent déduire aisément le sens de ce préfixe : maque la sortie, la séparation. Le mot  émigrer permet de voir que le préfixe « ex » peut prendre une forme abrégée.

 

  1. III. L’exercice III, variant les préfixes, permettra aussi de réfléchir aux variations orthographiques : pourquoi un seul « m » à émigrer et deux à immigrer ?  pourquoi transformer le « in » en « im » ?
  1. IV. L’exercice IV sensibilise davantage aux glissements de sens, porteurs  de marques idéologiques : l’étranger est celui qui paraît étrange ; qui inquiète. (le latin extraneus signifie « du dehors, extérieur, qui n’est pas de la famille, du pays, étranger »)
  1. V. L’exercice V permet de travailler autour du mot « bannissement », le ban étant  relatif  aux proclamations officielles, à un arrêté municipal… , il se connote à la légalité, au respect de lois. « Publier les bans », à l’occasion d’un mariage, c’est le faire connaître publiquement, officiellement afin que ceux qui y verraient un empêchement le fassent savoir. A l’inverse, le « bannissement » consiste à chasser de la communauté , fondée sur le respect de ces lois.  Etymologiquement, le « forban » est celui qui est banni à l’étranger ; ce peut  être un pirate, un flibustier, un bandit.
  1. VI. L’extradition est l’action de remettre un criminel au gouvernement étranger dont il dépend et qui le réclame. Le mot provient du radical latin « traditio », qui désigne « l’action de livrer » alors que le préfixe « extra » suggère l’idée de « en dehors ».
  1. VII. Le mot « ostracisme » vient du grec ostrakismos, de ostrakon, qui désignait une coquille d’huître.  L’ostracisme était une peine de bannissement de la vie politique, en vigueur à Athènes. Le citoyen frappé d’ostracisme était banni pour une durée maximale de dix ans. Etymologiquement, l’ostracisme désignait la coquille d’huître, puis le tesson de céramique avec lesquels on votait pour infliger cette peine de justice.  Les Athéniens inscrivaient les noms des personnes jugées dangereuses, et donc à bannir, sur une coquille d’huître, puis sur un tesson d’argile. Ceux-ci étaient déposés dans une urne. De nos jours, l’ostracisme est une forme d’exclusion sociale.

 

 

←Etre né quelque part  

 

 

 

 

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Justifier son dessin à l’oral ou comment aborder l’argumentation en CE1

Voici la retrnascription d’une séance d’oral pour amener les élèves à justifier des choix et un propos 

 Mme Gajewski, Notre Dame de Lourdes, CE1

Justifier son dessin à l’oral ou comment aborder l’argumentation en CE1

On s’appuie sur les dessins des élèves 

 –       Partie résumé :

Le groupe de soutien explique leur dessin devant la classe et résume ainsi l’intrigue.

Remarque = ils éprouvent des difficultés à retrouver la trame de l’histoire, lorsqu’ils se remettent en groupe. Mais en s’appuyant sur leur dessin, ils y parviennent néanmoins.

 

–       Partie argumentative :

Les élèves  doivent justifier leurs choix de dessins.

 Extrait de la discussion/ débat

Exemples de questions :Professeur : – « Arthur, qu’as-tu représenté sur ton dessin ?Arthur : – j’ai représenté l’oasis… » Matthieu aide Arthur : « c’est la première page du livre »

(…)

 

Yvan a dessiné les hommes en bleu dans le désert.

Yvan : – « Il fait chaud.

Professeur – : Comment voit-on qu’il fait chaud ?

Yvan : – Il y a du sable.

 

Professeur – : De quoi a-t-on besoin quand il fait chaud ?

Yvan : – De l’eau. »

(…)

Charles : « -A la fin, ils partagent mais ils auraient pu se battre mais ils partagent. »

Charles a dessiné les deux chefs qui boivent du thé.

Professeur – Que penses-tu de cela ?

Charles : – C’est bien qu’ils partagent.

Les autres sont d’accord.

 

 

 

 

Etape 2 : Ouverture à la classe, et aux choix de mots, pour construire un vocabulaire collectif

Objectifs = Responsabiliser les élèves dans la constitution d’une valise de mots d’Afrique

Travailler la notion de champs lexicaux

Faciliter la compréhension du vocabulaire

 

Lanceur = Enzo dit avoir  aimé le moment où les chameaux boivent l’eau de l’oasis.

C’est l’occasion pour le professeur de revenir sur le vocabulaire que les élèves manipulent de façon naturelle pendant la première séance d’oral.

 

Outil numérique = tableau blanc avec vidéoprojecteur, des captures d’écran de dictionnaire visuel, d’une carte du monde, de photogrammes de Zarafa…

 

Retranscription d’une partie des échanges :

Professeur – « A quoi sert le dictionnaire ?Manon – Il sert à comprendre des mots qu’on ne connaît pas. Il donne des définitions. » 

Une capture d’écran de dictionnaire visuel est projetée au tableau. Manon montre alors  les étendues de désert sur carte.

 

Professeur – « Peut-on traverser le désert facilement ?

Loan – Non, nous on n’a pas l’habitude, on risquerait de mourir de soif.

(…)

Professeur – Qui habite dans le désert alors ? Qui sont les hommes de l’histoire de l’Oasis ?

Loïc – des hommes en noir et en bleu.

Professeur- Que portent-ils sur leur tête ?

Marthe – Des foulards.

Professeur- C’est presque cela Marthe, tu en portes toi aussi, ta maman t’en a sûrement déjà acheté une. Ce n’est pas les mêmes foulards que dans le désert, mais ce sont des « chèches ».

Marthe-Ah, oui, j’en ai une.

Professeur- De quelle couleur est la tienne?

Marthe-Rose.

Professeur- Pourquoi portent-ils ces grandes écharpes nouées autour de la tête?

Loïc- Pour se protéger.

Professeur- De quoi ?

Loïc- Du soleil et du sable.

Professeur- Avez-vous déjà rencontré le même type de personnages dans vos livres ou dans les films que vous avez vus ?

Silence.

Professeur- Vous vous souvenez de Zarafa. Quel personnage était semblable ?

Charles –   Ah, oui, Zarafa…c’est celui qui est avec Le petit garçon ?

Professeur- Oui, c’est le même personnage,  ces hommes en bleu, ou en noir sont des « touaregs ».

Professeur- Comment se déplacent-ils ?

Loan- Ils se déplacent avec des chameaux et, en groupes.

Professeur- Oui, c’est ce que l’on appelle une caravane. Les touaregs sont des nomades, ils vivent sous des tentes et se déplacent beaucoup.

Professeur :- Dans Zarafa, qu’est-ce qui vous fait encore penser à l’Afrique ?

 

Une capture d’écran d’un extrait du film d’animation de Zarafa est projetée au tableau :

 

Professeur : -«  En quoi cette image vous fait-elle penser au désert ?

 

Ensemble, les élèves énumèrent  une girafe, le gnou, les palmiers, les baobabs, un touareg, le sable, un africain…

 

Professeur : Quelle différence faites-vous entre le touareg et le petit garçon africain. ?

 

Rappel de l’institutrice avec les enfants alors sur les conditions géographiques.  Explication des différences de la pigmentation de la peau : « En regardant la carte on s’aperçoit que, plus on est proche de l’équateur plus la peau est noire (différence entre l’Afrique du Nord et l’Afrique du sud). »

 

Professeur : –Nous allons maintenant classer tous les mots que vous avez trouvés aujourd’hui, pendant notre séance. On va tout écrire au tableau blanc. Vous avez vous-mêmes constitué votre « réserve de mots », dont vous aurez besoin pour écrire.

 

 

Un classement en plusieurs champs lexicaux a été réalisé, d’autres termes ont été convoqués pendant ce relevé, en ajoutant d’autres termes acquis par les élèves au préalable.

 

l’homme a t-il une couleur?

 

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Ecrit de synthèse en CE1 : du dessin au résumé de l’histoire

Mme Gajewski, Notre Dame de Lourdes, CE1

Patricia Fauquembergue

Lycée Aire sur la lys

Séance préparatoire = en classe entière, le livre  « Oasis » de Thierry Lenain et Olivier André (Editions Nathan) a été lu par le professeur des écoles, puis des groupes sont constitués, les enfants à partir de dessins, résument un passage du livre, l’expliquent à la maîtresse, qui écrit sous la dictée des élèves. Le schéma narratif est ainsi reconstitué.

Etapes de la démarche pour parvenir à reconstituer la chronologie de l’histoire:

Exemples de dessins d’élèves 

Sans titre1

MARTHE CE1

Enzo

Enzo CE1

 

Sans titre3

Loïc CE1

 

Phrases sous dictée par le professeur sur proposition des enfants qui commentent leurs dessins 

 

  1. l’oasis se trouve dans le désert: Marthe, Claire, Arthur, Océane (dessine le désert nu)
  2. Les hommes en noir courent dans le désert : Siméon
  3. Les hommes en bleu courent dans le désert : Louis J, Matt, Yvan
  4. Les hommes en noir arrivent dans l’oasis : Alex, Louis G, Anaïs, Matthieu
  5. Les hommes en bleu attendent : Loïc
  6. Les hommes en noir partent et les hommes en bleu arrivent à l’oasis : Elise
  7. Les hommes en noir sont pris dans la tempête : Gabriel
  8. Les hommes en bleu profitent de l’oasis : Jean-Baptiste, Maxime, Enzo, Louise
  9. Les hommes en bleu dorment, les hommes en noir reviennent : Aurélien

10. Les 2 chefs boivent le thé, la lune sourit : Pauline, Carla, Hugo, Manon, Adam, Eva, Anna, Charles

 

  1.  Les propositions sont  négociées  et permettent à la classe  d’écrire le scénario suivant :

 

Situation initiale =

Les hommes en noir et les hommes en bleu courent dans le désert pour trouver l’oasis.

Evénement perturbateur =

les premiers arrivés à l’oasis sont les hommes en noir.

Péripétie 1=

les hommes en bleu arrivent sur le lieu eux aussi, après le départ des hommes en noir.

Péripétie 2 =

les hommes en noir sont pris dans la tempête, alors que les autres se reposent à l’oasis.

Elément de résolution =

les hommes en noir reviennent pendant la nuit à l’oasis.

Situation finale =

les deux groupes d’hommes prennent finalement le thé ensemble.

 

 

 

 

← L’homme at-il une couleur ?

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Tahar Ben Jelloun  » Le racisme expliqué à ma fille »

Extrait de Tahar Ben Jelloun, né en 1944, Le Racisme expliqué à ma fille

– Dis, Papa, je n’ai toujours pas compris pourquoi le racisme existe un peu partout.

-Dans les sociétés très anciennes, dites primitives, l’homme avait un comportement proche de celui de l’animal. Un chat commence par marquer son territoire. Si un autre chat, ou un autre animal, tente de lui voler sa nourriture ou de s’en prendre à ses petits, le chat qui se sent chez lui se défend et protège les siens de toutes ses griffes. L’homme est ainsi. Il aime avoir sa maison, sa terre, ses biens et se bat pour les garder. Ce qui est normal. Le raciste, lui, pense que l’étranger, quel qu’il soit, va lui prendre ses biens. Alors il s’en méfie, sans même réfléchir, presque d’instinct. L’animal ne se bat que s’il est attaqué. Mais parfois l’homme attaque l’étranger sans même que celui-ci ait l’intention de lui ravir quoi que ce soit. »

←l’homme  a-t-il une couleur?

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Construire un itinéraire humaniste en CE1 : L’homme a-t-il une couleur ?

 Construire un itinéraire humaniste en CE1 :

L’homme a-t-il une couleur ?

 

 

Mme Gajewski, Notre Dame de Lourdes, CE1

et

 Mme Fauquembergue, professeur de lettres du Lycée Vauban, Aire sur la Lys

 

Niveau : CE1

 

Objet d’étude, thème du programme : favoriser la culture humaniste, savoir lire les textes du patrimoine et écrire un texte de 5 à 10 lignes. / BO du 19 juin 2008 

 

Objectifs généraux du projet : amener les élèves à être tolérants, ouverts à la figure de l’autre

 

Decouverte du monde

Découvrir le monde du vivant, de la matière et des objets : de l’observation à la théorie ( raisonnement inductif) : découverte du cycle de l’eau , de l’écosystème (pb de sécheresse en Afrique)

lecture

L’Oiseau de Pluie, édition Père Casto René Philombe, « L’homme qui te ressemble », p 131 de l’anthologieSenghor « Poème à mon frère blanc »

Liste de lectures complémentaires :L’Oasis, de Thierry Lenain et Olivier André, édition Nathan

Comme des frères, François David

Fatou Diome  : Le ventre de l’Afrique p: 179

Sept milliards de visagesTu veux ma photo ? Noire comme le café, blanc comme la luneCôté cœur, Rasca

Le racisme expliqué à ma fille anthologie p: 81  

culture humaniste / histoire des arts

Projet Spectacle djembé :Découverte de la culture africaine par le biais d’un instrument de musique : les élèves découvriront l’usage du djembé avec un professionnel et développeront l’oralité en racontant une histoire à  partir de cet instrument. Spectacle prévu le 29 mars. S’interroger sur le langage universel: à partir de l’observation de Sculpture de Jaume Plensa, We  et de l’écoute d’un conte écrit par les élèves de seconde du lycée Vauban d’Aire sur la Lys

Types d’écrits travaillés

Ecriture sous la dictée : première approche de la notion de schéma narratif à partir de lectures de jeunessePar travaux de groupes :Donner un titre au spectacle de djembéEcrire un début de dialogue entre les deux personnages de Disney, Donald et le Perroquet, dans Desenho Aquarela do Brasil – (de 2 à 4 répliques)Ecrire un début ou une suite de poème  (minimum 4 vers) à partir des poèmes de Philombe et de Senghor  

langue

Construire une valise de mots (champs lexicaux) : l’Afrique, en particulier, les instruments de musique, les couleurs, la différence Apprentissage des temps verbaux : présent, futur 

oral

Théâtralisation (marionnettes, jeux de rôles en binôme)Exposés oraux  Spectacle Djembé avec pratique orale

 

 

Présentation synthétique de la séquence  puis détail de l’activité et/ou de la séance proposée :

 

Séance 1 : Séance de  problématisation = entrer dans la séquence par une lecture de jeunesse

Support = L’Oiseau de Pluie, édition Père Castor

 

Objectif = sensibiliser l’élève au problème de la sécheresse, découvrir les différences culturelles par l’intermédiaire des personnages (le sage, la grand-mère), aborder le point de vue des générations. Cette lecture se fait en plusieurs étapes.

 

Séance 2 :  Découverte de la culture africaine n°1 

Objectifs = – découverte de la figure du griot

–       éveil musical en pratiquant le djembé.

–       éveil théâtral : découvert de la figure du conteur, travail sur l’expression corporelle associée au langage

Cette séance introduit le projet Djembé qui va drainer toutes les acivités qui suivent

 Voir le « Projet Djembé » 

 

 

Séance 3 : Exposé oral

–       Restitution sous forme de power point du film Sur le Chemin de l’école

–        Débat sur les différences éducatives :nterrogation : qu’est-ce qui me rapproche de l’ « autre » ?/ Thème de la fraternité, du rapport parents-enfants, de son autonomie.

Déroulement de la séance = une élève Anaïs est allée voir le film Sur le Chemin de l’école, elle en fait part à ses camarades de classe en résumant l’histoire et en s’attardant sur les personnages. Elle explique pourquoi le personnage de Samuel lui a plu.

Séance 4 : Séance de lecture préparatoire : «  L’Oasis, » de Thierry Lenain et Olivier André, édition Nathan

 Objectifs = Comprendre la notion de fraternité, l’acceptation de la différence, retrouver la trame de l’histoire ou comment lancer la notion de schéma narrati, justifier son dessin à l’oral ou comment aborder l’argumentation en CE1

  Résumé de l’intrigue : deux communautés de touaregs, les hommes en bleu et les hommes en noir  recherchent simultanément un point d’eau.

Démarche:  en classe entière, le livre a été lu par le professeur des écoles, puis des groupes sont constitués, les enfants à partir de dessins, résument un passage du livre, l’expliquent à la maîtresse, qui écrit sous la dictée des élèves. Le schéma narratif est ainsi reconstitué.

En soutien,  un groupe d’élèves, en difficulté de lecture est sollicité pour préparer un exposé oral sur ce livre.

La  séance est menée par le professeur de français, le professeur des écoles retranscrit en partie la conversation.

 

Extrait de la discussion/ débat autour des dessins Exemples de questions :Professeur : – « Arthur, qu’as-tu représenté sur ton dessin ?Arthur : – j’ai représenté l’oasis… » Matthieu aide Arthur : « c’est la première page du livre »

(…)

Yvan a dessiné les hommes en bleu dans le désert.

Yvan : – « Il fait chaud.

Professeur – : Comment voit-on qu’il fait chaud ?

Yvan : – Il y a du sable.

Professeur – : De quoi a-t-on besoin quand il fait chaud ?

Yvan : – De l’eau. »

(…)

Charles : « -A la fin, ils partagent mais ils auraient pu se battre mais ils partagent. »

Charles a dessiné les deux chefs qui boivent du thé.

Professeur – Que penses-tu de cela ?

Charles : – C’est bien qu’ils partagent.

Les autres sont d’accord.

 

Voir les   Dessins et phrases sous dictée  élaborés à partir d’Oasis 

Etape 2 : Ouverture à la classe, et aux choix de mots, pour construire un vocabulaire collectif

Objectifs = Responsabiliser les élèves dans la constitution d’une valise de mots d’Afrique

Travailler la notion de champs lexicaux

Faciliter la compréhension du vocabulaire

 

Lanceur = Enzo dit avoir  aimé le moment où les chameaux boivent l’eau de l’oasis.

C’est l’occasion pour le professeur de revenir sur le vocabulaire que les élèves manipulent de façon naturelle pendant la première séance d’oral.

 

Outil numérique = tableau blanc avec vidéoprojecteur, des captures d’écran de dictionnaire visuel, d’une carte du monde, de photogrammes de Zarafa…

Retranscription d’une partie des échanges :Professeur – « A quoi sert le dictionnaire ?Manon – Il sert à comprendre des mots qu’on ne connaît pas. Il donne des définitions. »

Une capture d’écran de dictionnaire visuel est projetée au tableau. Manon montre alors  les étendues de désert sur carte.

 Professeur – « Peut-on traverser le désert facilement ?

Loan – Non, nous on n’a pas l’habitude, on risquerait de mourir de soif.

(…)

Professeur – Qui habite dans le désert alors ? Qui sont les hommes de l’histoire de l’Oasis ?

Loïc – des hommes en noir et en bleu.

Professeur- Que portent-ils sur leur tête ?

Marthe – Des foulards.

Professeur- C’est presque cela Marthe, tu en portes toi aussi, ta maman t’en a sûrement déjà acheté une. Ce n’est pas les mêmes foulards que dans le désert, mais ce sont des « chèches ».

Marthe-Ah, oui, j’en ai une.

Professeur- De quelle couleur est la tienne?

Marthe-Rose.

Professeur- Pourquoi portent-ils ces grandes écharpes nouées autour de la tête?

Loïc- Pour se protéger.

Professeur- De quoi ?

Loïc- Du soleil et du sable.

Professeur- Avez-vous déjà rencontré le même type de personnages dans vos livres ou dans les films que vous avez vus ?

Silence.

Professeur- Vous vous souvenez de Zarafa. Quel personnage était semblable ?

Charles –   Ah, oui, Zarafa…c’est celui qui est avec Le petit garçon ?

Professeur- Oui, c’est le même personnage,  ces hommes en bleu, ou en noir sont des « touaregs ».

Professeur- Comment se déplacent-ils ?

Loan- Ils se déplacent avec des chameaux et, en groupes.

Professeur- Oui, c’est ce que l’on appelle une caravane. Les touaregs sont des nomades, ils vivent sous des tentes et se déplacent beaucoup.

Professeur :- Dans Zarafa, qu’est-ce qui vous fait encore penser à l’Afrique ?

Une capture d’écran d’un extrait du film d’animation de Zarafa est projetée au tableau :

 Professeur : -«  En quoi cette image vous fait-elle penser au désert ?

Ensemble, les élèves énumèrent  une girafe, le gnou, les palmiers, les baobabs, un touareg, le sable, un africain…

 

Professeur : Quelle différence faites-vous entre le touareg et le petit garçon africain. ?

Rappel de l’institutrice avec les enfants alors sur les conditions géographiques.  Explication des différences de la pigmentation de la peau : « En regardant la carte on s’aperçoit que, plus on est proche de l’équateur plus la peau est noire (différence entre l’Afrique du Nord et l’Afrique du sud). »

Professeur : –Nous allons maintenant classer tous les mots que vous avez trouvés aujourd’hui, pendant notre séance. On va tout écrire au tableau blanc. Vous avez vous-mêmes constitué votre « réserve de mots », dont vous aurez besoin pour écrire.

 

Un classement en plusieurs champs lexicaux a été réalisé, d’autres termes ont été convoqués pendant ce relevé, en ajoutant d’autres termes acquis par les élèves au préalable.

 

 Champs lexicaux = les hommes/ les continents et les pays/ Les animaux et les arbres dans le paysage/ Les vêtements et l’habitation. 

Ce tableau se complètera au fur et à mesure des séances.

 

Séance 6 =  Exercice de lexique : identifier à partir des dessins, les mots clés de l’histoire et retrouver sa signification dans le dictionnaire.

 

 

Séance 7=  Séance préparatoire à la lecture du texte de Philombe 

 

L’objectif central est d’amener l’élève à quitter son mode de vie, ses coutumes pour se projeter dans un autre espace-temps, et s’imaginer découvrir une autre maison et surtout d’autres personnes, incarnant la figure de l’étranger.

 

Objectifs :  – entrer dans le texte par le dessin

 

– choisir un titre qui illustre le dessin

 

Remarque : le poème de Philombe n’est pas distribué, il le sera ultérieurement.

 

Méthode :   Travail en binôme

Activité a) :  Imagine sous la forme d’un dessin, ce qui serait pour toi la maison idéale, la maison dans laquelle tu aimerais vivre. Puis retourne ton dessin, et donne un titre à ton dessin.

 

Activité b): Montre ton dessin à ton voisin, et demande-lui de donner un titre à ton dessin.

 

Séance 8 

Exploitation des dessins de la maison idéale : powerpoint des productions des élèves vidéoprojeté sur tableau blanc.

 Mise en commun = réflexion en classe autour des dessins et des propositions de titres.

Plusieurs maisons idéales sont répertoriées :

 

–       La maison- nature : la maison pomme, la maison coccinelle, la maison arbre, la maison de fleurs roses

–       La maison- cosmique : la maison lune, la maison des nuages

–       La maison –personnage :la maison cheval, la maison Hulk

–       La maison-bâtiment : ma maison à Béthune

–       La maison- plaisir : la maison bonbon, la maison cool

 

  Imagine-toi une autre maison  : Consigne = Imagine toi désormais en Afrique, ferme les yeux et rêve la maison idéale

 

Si ta maison était un arbre, elle serait….

Si ta maison était une fleur, elle serait…

Si ta maison était une personne, elle serait….

Si ta maison était un animal, elle serait….

Si ta maison était un bâtiment, elle serait…

Si ta maison était un fruit, elle serait…

Si ta maison était le personnage d’un livre, elle serait…

Tu as créé ta maison africaine, avec qui voudrais-tu la partager?

Qui ferais-tu entrer dans ta maison?

 

Séance 9 =  Lecture du texte de Philombe,1930-2001, « L’homme qui te ressemble », Gouttes de chant pour créer l’homme, 1977

 

Etape 1/ Première découverte du texte et formulation des  impressions des élèves:

 Objectif = aborder la question de la tolérance, et inversement du racisme, interrogation sur la couleur de l’homme.

Démarche pour accéder au sens global on exploita d’abord les premières réactions émotives  = quels mots aimez-vous dans ce poème ?

Pour Loan, c’est l’ « Asie », pour d’autres les couleurs : « rouge », «blanc », « jaune », « noir »…  C’est l’occasion de revenir sur les continents, sur les couleurs de peau et la race humaine. (Remarque = moment d’émotion d’Aurélien, dont les origines sont métissées).

Un élève demande ce que veut dire : « frappe à ton cœur », la maitresse change le mot et fait le lien avec « frappe à ta porte ». Retour sur le sens premier du texte : cet homme a besoin de quelque chose : d’un feu, d’un lit…alors quelle différence avec « frappe à ton cœur » ?

L’idée de la fraternité se dégage, même si le nom de métaphore n’est pas donné, (on garde l’idée que c’est une expression)  le sens du texte se fait jour ici.

 

 Etape 2/ Séance écriture = S’approprier un texte poétique en réécrivant la fin. 

 

Objectifs   →Prolongement de l’exploitation des dessins, et du vocabulaire africain

                       niveau de la maitrise delalangue : Observation des négatives, et du rôle la conjonction de coordination « mais » au niveau grammatical ► enjeu de la dernière phrase

                       observation des effets poétiques :

 

Je ne suis pas un noir

Je ne suis pas un rouge

Je ne suis pas un jaune

Je ne suis pas un blanc

Mais je ne suis qu’un homme

Ouvre-moi mon frère !...

 

Consigne = Réécrire la fin du poème:

Mets-toi à la place du poète et en t’inspirant de l’écriture de Philombe, écris  une phrase affirmative, qui pourrait être mise à la suite.

Ne cherche pas à copier Philombe, écris ce que tu ressentirais, si tu étais à sa place.

La mise en commun est collective .

 

Séance 10 = Séance écriture dans le cadre de la rédaction des invitations aux parents pour le spectacle de djembé.

 

Démarche : 

Ecriture par binôme sur les invitations :

Pour déclencher ce travail d’écriture on projette dans le cadre de l’ éducation musicale le dessin animé « Donald », Desenho Aquarela do Brasil

On  étudie un point de conjugaison =  le  verbe « inviter », premier groupe

Le travail est réparti comme suit

Groupe 1 : Carte Invitation Partie 1 : Créer un support djembé, avec à l’intérieur le nom de la classe et de la maîtresse  (avoir à disposition des modèles de djembé)

Groupe 2 : Carte invitation Partie 2 : Créer un dessin + trouver un titre pour le spectacle

Groupes 3-4-5 : Créer un dialogue : Imagine ce que se disent les personnages. Ils discutent de musique. Utilise la disposition suivante. Ecris de 2 à 4 phrases. Exemple:

Donald prend la parole et dit au perroquet :

-« ………………………………………. »

L’autre répond :

-« ……………………………………….. »

Tu peux utiliser une phrase interrogative, ou affirmative, ou négative.

– Groupes 6-7 : Travail de lexique : Observe le dessin animé, et retrouve dans le dictionnaire la « samba ». Quelle est l’origine de cette danse ? Puis trouve des instruments de musique divers, et rappelle leurs origines (quels pays ?)

        Exemple de  brouillons de cartons d’invitation d’élèves

Invitation finale pour le  spectacle Djembé 

   

 

   Séance 11 = Rencontre CE1 de Notre Dame/ Seconde du Lycée Vauban

 

Atelier/ Lieu de rencontre = Notre Dame

 

Objectifs

a/ Au niveau pédagogique

Faire des élèves de seconde, des passeurs, des guides

Responsabiliser les élèves et établir des passerelles

b) Au niveau didactique     

Métamorphoser le monde par le langage : les comparaisons et métaphores

Aborder la phrase complexe par le jeu

Organisation = Chaque groupe de CE1  (3-4 élèves) est pris en charge par un élève de seconde 1. En tout huit élèves de secondes encadrent ces travaux.

Remarque :La classe de seconde 1 a réalisé le même exercice deux jours auparavant.

Le travail consiste à partir de la structure du poème de Senghor « Poème à mon frère blanc » de leur faire écrire la suite.

Remarque : le poème sera lu ensuite en classe entière

Il s’agit de les placer devant une situation problème et de laisser libre cours à leur imagination, en réactivant les connaissances acquises sur l’Afrique, pendant l’année.

Documents et objets annexes :

Pendant la séance,  les élèves ont à leur disposition des objets africains, ou malgaches (masques, jouets, cases, statues, chapeau…), mais ils ont également  plusieurs fiches, et plus précisément :

1.Une fiche de vocabulaire récapitulative (mots étiquettes)

.

Champ lexical des vêtements : un chèche, un turban, un pagne, un boubou

Champ lexical de l’habitation et du mode de vie : une case, une pirogue, un bandiagara

Champ lexical des habitants et des figures africaines importantes : un touareg, un africain, un griot, un sage de village

Champ lexical du climat et des animaux : une oasis, un dromadaire, une girafe, la savane.

2.Deux cartes « Découverte du monde »

La  première est une carte des pays d’Afrique

La seconde restitue les trois zones climatiques : le désert, la savane, la jungle.

3.Une fiche de présentation des instruments de musique :

Support = pages 24-25 du livre Timbélélé et la reine Lune

Instruments identifiés : le khollé, la kora, la balafon, la tama ou tambour parleur, le djembé

Description de la démarche  :

Activité 1 : reprendre la structure du poème A

Complète les trois vers suivants :

Cher

Quand je suis né, je

Quand j’ai grandi, je

 

Activité 2 : reprendre la structure du poème B

Cher frère

Quand je

Quand je

Activité 3 : Associer les mots trouvés avec des prépositions

Idée du jeu surréaliste

Associe les mots de la Valise avec les prépositions de, du, pour, avec…

Ecris une dernière fois le poème avec les expressions créées.

Exemple :

soleil

Lion

fleur

sable

Le soleil de sable, le lion de sable, la fleur de sable

La fleur pour le lion

Le lion du soleil, le lion de soleil

A la fin de la séance : Collecte des différents poèmes

Déroulement de la séquence: On retrouvera un vif intérêt partagé par les élèves des deux classes, et un vrai plaisir d’écriture.

Les élèves passeront souvent de l’étape 1 à l’étape 3, en fonction des propositions des élèves de CE1. Pour faciliter aussi leur capacité à se projeter dans un personnage,  dans la réécriture finale, la proposition hypothétique « Si j’étais »  est introduite.

 

Analyse :

a.La première étape consiste à définir le schéma de l’énonciation : qui parle ? à qui ?

 
Les destinataires seront souvent le « frère », l’ami, mais pas systématiquement. Il pourra s’agir  d’objets comme un hélicoptère malgache (jouet amené par l’un des élèves de seconde), ou un bâton de pluie. Certains élèves choisissent aussi d’écrire à Marcel ou au continent Africain.  
 
Les élèves ont également choisi de se positionner dans un « corps » différent.  Lors de la réécriture finale, ils choisiront d’être : 
- soit un animal, comme une girafe, un éléphant multicolore, un lion, un jaguar
- soit une habitation africaine comme une case
- soit un élément naturel,  un arbre comme le baobab ou une dune
- soit une personne, comme un touareg, un sage, un griot
.

Remarque un élève choisit de rester lui-même : « Si j’étais en Afrique, j’aimerais voir des girafes.»

  1. La deuxième étape consiste à construire une phrase complexe
.  
Ce qui n’est pas en soi facile, puisque la phrase complexe n’est pas au programme des CE1, c’est donc une phase de découverte. 
 
En outre, le temps verbal acquis et utilisé fréquemment par les élèves est le présent. Ils ont cependant des notions de temporalité, savent situer le présent, par rapport au passé et au futur. Mais le temps du futur par exemple sera appris plus tard dans l’année scolaire. L’emploi du conditionnel ne relève pas non plus des acquis. Quelques erreurs au niveau des temps verbaux seront repérées. 
 
Ce qui demeure essentiel dans l’exercice est la capacité de l’élève à se « dédoubler » et à se positionner dans deux espaces temps différents, le sien, et celui de l’autre. 
 
On relèvera des phrases comme :
 
                Exemple 1 :  
Cher Marcel et Afrique, 
Quand je suis né, je ne te connaissais pas. Quand j’ai grandi, j’ai appris à jouer du djembé avec toi. 
 
Variante : « j’ai appris à jouer du djembé grâce à toi. Exemple 2 :
 « Cher Marcel d’Afrique, 
Quand je suis né, j’étais un garçon blanc, 
Quand je serais grand, je serais un touareg avec une chèche.
 »                                              Exemple 3 : 
« Cher Matt, 
Quand je suis né, je n’ai jamais vu d’éléphant. 
Quand j’ai grandi, j’ai découvert l’Afrique. » Exemple 4 : 
« Cher sage du village
. Quand je suis né, j’ai vu une girafe. 
Quand j’ai grandi, je suis devenu musicien. 
Je joue du tambour parleur. 
 » Exemple 5 : 
« Cher frère, 
Si j’étais le vieux sage
Je soignerai des gens, 
Je ramènerai l’eau   dans le village. » 
Exemple 6 : « Chers parents, 
Quand je suis né, je jouais du balafon, 
Quand j’ai grandi,  je suis devenu une girafe «  Exemple 7 : « Cher frère, 
Si j’étais un éléphanteau, 
Je jouerai à cache cache dans la jungle. »   
  1. Analyse         
                                                                                                                                                                                                                                                                                                       
On retrouve des acquis dans l’exemple 5, concernant la géographie, avec le problème de la sécheresse. Dans l’exemple 2, l’enfant parle de ses rêves : d’ailleurs, il écrit sur sa feuille quand on lui demande de donner quelques explications : « je rêve d’être un touareg, un chameau ou un dromadaire, pour être à l’oasis. Dans l’exemple 3, l’enfant se projette dans l’avenir. Dans l’exemple 4, l’élève exploite le thème musical, tandis que dans la copie 6, l’intérêt de l’écriture réside dans le rapprochement phonique entre « balafon » et « girafe ».

 

  1.   La troisième étape : la création des images poétiques
.   
Dans l’ensemble, les élèves vont spontanément vers un sens rationnel, leurs écrits sont logiques, clairs, cependant cette étape vise à aller vers une autre logique, celle des associations de mots, ou n’ayant pas de lien, du moins en apparence, les menant ainsi vers la voie de la poésie.  
 
Les mots sont notés sur la feuille puis combinés entre eux : 
 
- le touareg bleu, la girafe du touareg, le sable heureux
- Le rouge feu du boubou
- Le chameau de sable 
 -Le touareg de l’eau
- le sang de feu
- L’herbe de baobab
- le boubou de sable
- Le léopard qui sourit
- la girafe masque 
- le trésor de la savane
- le bonheur du sage
 
Parmi ces quelques propositions d’élèves, on trouve des personnifications, comme « le léopard qui sourit », des associations visuelles et sonores comme « le rouge feu du boubou », avec une assonance en  [u], une anacoluthe « une girafe masque »…
 

Quelques exemples de poèmes finals

 

 

 

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Senghor, « Poème à mon frère blanc », R. Philombe, » L’homme qui te ressemble »

Poème à mon frêre blanc Cher frère blanc,
Quand je suis né, j’étais noir,
Quand j’ai grandi, j’étais noir,
Quand je suis au soleil, je suis noir,
Quand je suis malade, je suis noir,
Quand je mourrai, je serai noir.Tandis que toi, homme blanc,
Quand tu es né, tu étais rose,
Quand tu as grandi, tu étais blanc,
Quand tu vas au soleil, tu es rouge,
Quand tu as froid, tu es bleu,
Quand tu as peur, tu es vert,
Quand tu es malade, tu es jaune,
Quand tu mourras, tu seras gris.Alors, de nous deux,
Qui est l’homme de couleurSenghor , « poème à mon frère  blanc
L’homme qui te ressemble J’ai frappé à ta porteJ’ai frappé à ton cœurPour avoir un bon litPour avoir un bon feu

Pourquoi me repousser ?

Ouvre-moi mon frère !…

 

Pourquoi me demander

Si je suis d’Afrique

Si je suis d’Amérique

Si je suis d’Asie

Si je suis d’Europe ?

Ouvre-moi mon frère !…

 

Pourquoi me demander

La longueur de mon nez

L’épaisseur de ma bouche

La couleur de ma peau

Et le nom de mes dieux ?

Ouvre-moi mon frère !…

 

Je ne suis pas un noir

Je ne suis pas un rouge

Je ne suis pas un jaune

Je ne suis pas un blanc

Mais je ne suis qu’un homme

Ouvre-moi mon frère !…

 

Ouvre-moi ta porte

Ouvre-moi ton cœur

Car je suis un homme

L’homme de tous les temps

L’homme de tous les cieux

L’homme qui te ressemble.    

                                                                                  René Philombe, 1930-2001, « Gouttes de chant pour créer l’homme, 1977

←Exploitation des deux poèmes en CEI

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Exploiter le poème de Senghor et de Philombe en classe de CE1

                       

 

MMe Gajewski  

                                     Ecole Notre Dame de Lourdes Béthune  classe de CE1

Patricia Fauquemberghe 

lycée Aire sur la lys 

 

Démarche d’étude pour aborder les poèmes de Senghor et de Philombe        

L’objectif central est d’amener l’élève à quitter son mode de vie, ses coutumes pour se projeter dans un autre espace-temps, et s’imaginer découvrir une autre maison et surtout d’autres personnes, incarnant la figure de l’étranger. 

 

Objectifs :  – en CE1 : entrer dans le texte par le dessin

– choisir un titre qui illustre le dessin

On commence par le poème de Philombe , celui de Senghor sera découvert lors de la rencontre  intercycle des CE1 et des élèves de Première à Notre Dame

Remarque : le poème de Philombe n’est pas distribué, il le sera ultérieurement.

Méthode :   Travail en binôme

Séance 1

Activité a) : Imagine sous la forme d’un dessin, ce qui serait pour toi la maison idéale, la maison dans laquelle tu aimerais vivre. Puis retourne ton dessin, et donne un titre à ton dessin.

Activité b): Montre ton dessin à ton voisin, et demande-lui de donner un titre à ton dessin.

Séance 2

Le travail est ramassé, pour la séance suivante.

Séance 8 = Exploitation des dessins de la maison idéale

 

Etape 1/ Support = Powerpoint des productions des élèves vidéoprojeté sur tableau blanc.

 

Mise en commun = réflexion en classe autour des dessins et des propositions de titres.

Plusieurs maisons idéales sont répertoriées :

–       La maison- nature : la maison pomme, la maison coccinelle, la maison arbre, la maison de fleurs roses

–       La maison- cosmique : la maison lune, la maison des nuages

–       La maison –personnage :la maison cheval, la maison Hulk

–       La maison-bâtiment : ma maison à Béthune

–       La maison- plaisir : la maison bonbon, la maison cool

 

Etape 2/ Imagine-toi une autre maison  

 

Consigne =Imagine toi désormais en Afrique, ferme les yeux et rêve la maison idéale

Si ta maison était un arbre, elle serait….

Si ta maison était une fleur, elle serait…

Si ta maison était une personne, elle serait….

Si ta maison était un animal, elle serait….

Si ta maison était un bâtiment, elle serait…

Si ta maison était un fruit, elle serait…

Si ta maison était le personnage d’un livre, elle serait

 

Tu as créé ta maison africaine, avec qui voudrais-tu la partager?

Qui ferais-tu entrer dans ta maison?

Séance 9 =  Lecture du texte de Philombe,1930-2001, « L’homme qui te ressemble », Gouttes de chant pour créer l’homme, 1977

 

Etape 1/ Première découverte du texte et impressions des élèves:

 

Séance orale = faire émerger les premières impressions d’élèves et le sens du texte

Objectif = aborder la question de la tolérance, et inversement du racisme, interrogation sur la couleur de l’homme.

Consigne = Quels mots aimez-vous dans ce poème ?

Pour Loan, c’est l’ « Asie », pour d’autres les couleurs : « rouge », «blanc », « jaune », « noir »…  C’est l’occasion de revenir sur les continents, sur les couleurs de peau et la race humaine.

Un élève demande ce que veut dire : « frappe à ton cœur », la maitresse change le mot et fait le lien avec « frappe à ta porte ». Retour sur le sens premier du texte : cet homme a besoin de quelque chose : d’un feu, d’un lit…alors quelle différence avec « frappe à ton cœur » ?

 

L’idée de la fraternité se dégage, même si le nom de métaphore n’est pas donné, (on garde l’idée que c’est une expression)  le sens du texte se fait jour ici.

Remarque = moment d’émotion d’Aurélien, dont les origines sont métissées.

 

Etape 2/ Séance écriture = S’approprier un texte poétique en réécrivant la fin. 

 

Objectifs = Prolongement de l’exploitation des dessins, et du vocabulaire africain

                   Observation des négatives, et du rôle la conjonction de coordination « mais » au niveau grammatical ► enjeu de la dernière phrase

                   Observation des effets poétiques :

 

Je ne suis pas un noir

Je ne suis pas un rouge

Je ne suis pas un jaune

Je ne suis pas un blanc

Mais je ne suis qu’un homme

Ouvre-moi mon frère !...

 

Consigne = Réécrire la fin du poème

Mets-toi à la place du poète et en t’inspirant de l’écriture de Philombe, écris  une phrase affirmative, qui pourrait être mise à la suite.

Ne cherche pas à copier Philombe, écris ce que tu ressentirais, si tu étais à sa place.  

 

Mise en commun collective.   

 

 

Séance 10 = Séance écriture dans le cadre de la rédaction des invitations aux parents pour le spectacle de djembé.

 

Méthode

Ecriture par binôme sur les invitations :

Support = Education musicale dessin animé « Donald », Desenho Aquarela do Brasil

Point de conjugaison =  La conjugaison verbe « inviter », premier groupe

Groupe 1 : Carte Invitation Partie 1 : Créer un support djembé, avec à l’intérieur le nom de la classe et de la maîtresse  (avoir à disposition des modèles de djembé)

Groupe 2 : Carte invitation Partie 2 : Créer un dessin + trouver un titre pour le spectacle

Groupes 3-4-5 : Créer un dialogue : Imagine ce que se disent les personnages. Ils discutent de musique. Utilise la disposition suivante. Ecris de 2 à 4 phrases.

Donald prend la parole et dit au perroquet :

-« ………………………………………. »

L’autre répond :

-« ……………………………………….. »

Tu peux utiliser une phrase interrogative, ou affirmative, ou négative.

– Groupes 6-7 : Travail de lexique : Observe le dessin animé, et retrouve dans le dictionnaire la « samba ». Quelle est l’origine de cette danse ? Puis trouve des instruments de musique divers, et rappelle leurs origines (quels pays ?)

 Séance 11 = Rencontre CE1 de Notre Dame/ Seconde du Lycée Vauban

 

Atelier/ Lieu de rencontre = Notre Dame

 

Objectifs

a/ Au niveau pédagogique

Faire des élèves de seconde, des passeurs, des guides

Responsabiliser les élèves et établir des passerelles

b) Au niveau didactique     

Métamorphoser le monde par le langage : les comparaisons et métaphores

Aborder la phrase complexe par le jeu

Organisation = Chaque groupe de CE1  (3-4 élèves) est pris en charge par un élève de seconde 1. En tout huit élèves de secondes encadrent ces travaux.

Remarque :La classe de seconde 1 a réalisé le même exercice deux jours auparavant.

Le travail consiste à partir de la structure du poème de Senghor « Poème à mon frère blanc » de leur faire écrire la suite.

Remarque : le poème sera lu ensuite en classe entière

Il s’agit de les placer devant une situation problème et de laisser libre cours à leur imagination, en réactivant les connaissances acquises sur l’Afrique, pendant l’année.

Documents et objets annexes :

Pendant la séance,  les élèves ont à leur disposition des objets africains, ou malgaches (masques, jouets, cases, statues, chapeau…), mais ils ont également  plusieurs fiches, et plus précisément :

1.Une fiche de vocabulaire récapitulative (mots étiquettes)

.

Champ lexical des vêtements : un chèche, un turban, un pagne, un boubou

Champ lexical de l’habitation et du mode de vie : une case, une pirogue, un bandiagara

Champ lexical des habitants et des figures africaines importantes : un touareg, un africain, un griot, un sage de village

Champ lexical du climat et des animaux : une oasis, un dromadaire, une girafe, la savane.

2.Deux cartes « Découverte du monde »

La  première est une carte des pays d’Afrique

La seconde restitue les trois zones climatiques : le désert, la savane, la jungle.

3.Une fiche de présentation des instruments de musique :

Support = pages 24-25 du livre Timbélélé et la reine Lune

Instruments identifiés : le khollé, la kora, la balafon, la tama ou tambour parleur, le djembé

Description de la démarche  :

Activité 1 : reprendre la structure du poème A

Complète les trois vers suivants :

Cher

Quand je suis né, je

Quand j’ai grandi, je

 

Activité 2 : reprendre la structure du poème B

Cher frère

Quand je

Quand je

Activité 3 : Associer les mots trouvés avec des prépositions

Idée du jeu surréaliste

Associe les mots de la Valise avec les prépositions de, du, pour, avec…

Ecris une dernière fois le poème avec les expressions créées.

Exemple :

soleil

Lion

fleur

sable

Le soleil de sable, le lion de sable, la fleur de sable

La fleur pour le lion

Le lion du soleil, le lion de soleil

A la fin de la séance : Collecte des différents poèmes

Déroulement de la séquence: On retrouvera un vif intérêt partagé par les élèves des deux classes, et un vrai plaisir d’écriture.

Les élèves passeront souvent de l’étape 1 à l’étape 3, en fonction des propositions des élèves de CE1. Pour faciliter aussi leur capacité à se projeter dans un personnage,  dans la réécriture finale, la proposition hypothétique « Si j’étais »  est introduite.

 

Analyse :

a.La première étape consiste à définir le schéma de l’énonciation : qui parle ? à qui ?

 
Les destinataires seront souvent le « frère », l’ami, mais pas systématiquement. Il pourra s’agir  d’objets comme un hélicoptère malgache (jouet amené par l’un des élèves de seconde), ou un bâton de pluie. Certains élèves choisissent aussi d’écrire à Marcel ou au continent Africain.  
 
Les élèves ont également choisi de se positionner dans un « corps » différent.  Lors de la réécriture finale, ils choisiront d’être : 
- soit un animal, comme une girafe, un éléphant multicolore, un lion, un jaguar
- soit une habitation africaine comme une case
- soit un élément naturel,  un arbre comme le baobab ou une dune
- soit une personne, comme un touareg, un sage, un griot
.

Remarque un élève choisit de rester lui-même : « Si j’étais en Afrique, j’aimerais voir des girafes.»

  1. La deuxième étape consiste à construire une phrase complexe
.  
Ce qui n’est pas en soi facile, puisque la phrase complexe n’est pas au programme des CE1, c’est donc une phase de découverte. 
 
En outre, le temps verbal acquis et utilisé fréquemment par les élèves est le présent. Ils ont cependant des notions de temporalité, savent situer le présent, par rapport au passé et au futur. Mais le temps du futur par exemple sera appris plus tard dans l’année scolaire. L’emploi du conditionnel ne relève pas non plus des acquis. Quelques erreurs au niveau des temps verbaux seront repérées. 
 
Ce qui demeure essentiel dans l’exercice est la capacité de l’élève à se « dédoubler » et à se positionner dans deux espaces temps différents, le sien, et celui de l’autre. 
 
On relèvera des phrases comme :
 
                Exemple 1 :  
Cher Marcel et Afrique, 
Quand je suis né, je ne te connaissais pas. Quand j’ai grandi, j’ai appris à jouer du djembé avec toi. 
 
Variante : « j’ai appris à jouer du djembé grâce à toi. Exemple 2 :
 « Cher Marcel d’Afrique, 
Quand je suis né, j’étais un garçon blanc, 
Quand je serais grand, je serais un touareg avec une chèche.
 »                                              Exemple 3 : 
« Cher Matt, 
Quand je suis né, je n’ai jamais vu d’éléphant. 
Quand j’ai grandi, j’ai découvert l’Afrique. » Exemple 4 : 
« Cher sage du village
. Quand je suis né, j’ai vu une girafe. 
Quand j’ai grandi, je suis devenu musicien. 
Je joue du tambour parleur. 
 » Exemple 5 : 
« Cher frère, 
Si j’étais le vieux sage
Je soignerai des gens, 
Je ramènerai l’eau   dans le village. » 
Exemple 6 : « Chers parents, 
Quand je suis né, je jouais du balafon, 
Quand j’ai grandi,  je suis devenu une girafe « .  Exemple 7 : « Cher frère, 
Si j’étais un éléphanteau, 
Je jouerai à cache cache dans la jungle. »   

 

  1. Analyse         
                                                                                                                                                                                                                                                                                                       
On retrouve des acquis dans l’exemple 5, concernant la géographie, avec le problème de la sécheresse. Dans l’exemple 2, l’enfant parle de ses rêves : d’ailleurs, il écrit sur sa feuille quand on lui demande de donner quelques explications : « je rêve d’être un touareg, un chameau ou un dromadaire, pour être à l’oasis. Dans l’exemple 3, l’enfant se projette dans l’avenir. Dans l’exemple 4, l’élève exploite le thème musical, tandis que dans la copie 6, l’intérêt de l’écriture réside dans le rapprochement phonique entre « balafon » et « girafe ».
  1.   La troisième étape : la création des images poétiques
.   
Dans l’ensemble, les élèves vont spontanément vers un sens rationnel, leurs écrits sont logiques, clairs, cependant cette étape vise à aller vers une autre logique, celle des associations de mots, ou n’ayant pas de lien, du moins en apparence, les menant ainsi vers la voie de la poésie.  
 
Les mots sont notés sur la feuille puis combinés entre eux : 
 
- le touareg bleu, la girafe du touareg, le sable heureux
- Le rouge feu du boubou
- Le chameau de sable 
 -Le touareg de l’eau
- le sang de feu
- L’herbe de baobab
- le boubou de sable
- Le léopard qui sourit
- la girafe masque 
- le trésor de la savane
- le bonheur du sage
 
Parmi ces quelques propositions d’élèves, on trouve des personnifications, comme « le léopard qui sourit », des associations visuelles et sonores comme « le rouge feu du boubou », avec une assonance en  [u], une anacoluthe « une girafe masque »…
 

Quelques exemples de poèmes finals

 ←l’homme  a t-il une couleur?

 

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Senghor « Poème à mon frêre blanc »

Senghor, « Poème à mon frère blanc »,

 

Cher frère blanc,
Quand je suis né, j’étais noir,
Quand j’ai grandi, j’étais noir,
Quand je suis au soleil, je suis noir,
Quand je suis malade, je suis noir,
Quand je mourrai, je serai noir.

Tandis que toi, homme blanc,
Quand tu es né, tu étais rose,
Quand tu as grandi, tu étais blanc,
Quand tu vas au soleil, tu es rouge,
Quand tu as froid, tu es bleu,
Quand tu as peur, tu es vert,
Quand tu es malade, tu es jaune,
Quand tu mourras, tu seras gris.

Alors, de nous deux,
Qui est l’homme de couleur ?

 

←l’homme a t-il une couleur?

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La question sur corpus

Véronique Perrin

Lycée Voltaire  Wingles

La question sur corpus :

 Les Nomades

Le corpus présente un sonnet du XIXème siècle, écrit par Ch. Baudelaire en 1857 : « Bohémiens en voyage » et trois autres poèmes du XXème S. : « La Tzigane », de G. Apollinaire (1913), « L’Etrangère » de L. Aragon (1956) et « Les Nomades » de M. Senlis (1961). Tous évoquent le monde des bohémiens.  Ce portrait est-il réaliste ?

Tout d’abord le réalisme de ces évocations ressort de leur présentation sociale. La vie qu’ils mènent est pauvre. Les bohémiens de Baudelaire voyagent dans des « chariots » (V.6), ceux de Senlis dans des « roulotte(s) » faites de « quatre planches qui cahotent » (V.6/7) avec pour seule monture « les mulets et les ânes » (V.37). La tribu de Baudelaire emporte « ses petits / Sur son dos » (V.2/3). Quant aux bohémiens d’Aragon, ils vivent dans « un bas quartier » (V.2) Les conditions précaires rendent leur vie difficile et Senlis souligne qu’ « ils ont eu froid comme personne » (V.21). Mais ceci ne retranche rien à leur bonheur d’être libres et, malgré tout, « ils ont chanté mieux que nous tous » (V.22).

La liberté, ils la détiennent de leur nomadisme, auquel trois poètes se réfèrent en l’évoquant, là encore, avec grand réalisme. Les bohémiens de Baudelaire se sont « mis en route » (V.2) et, sans tabou, les mères allaient leurs enfants en exhibant leurs « mamelles pendantes » (V.4). Les nomades évoqués par Senlis parcourent les quatre coins de l’univers, d’où les différents noms de lieux réels ponctuant le poème : Barcelone, l’Australie, Paris, Saint-Ouen, les Saintes-Maries. Rien ne saurait leur « mett(re) racines aux pieds » (V.13), ni le mariage symbolisé métonymiquement par la couronne d’oranger (V.11), ni le confort d’une vie sédentaire dotée d’une « cheminée de faux marbre » (V.12). Leur trésor est de pouvoir consacrer leur vie au plaisir de chanter (V.22), de jouer de la musique : les fifres les suivent (V.24) ; « un violon leur a brisé l’âme » (v.28). Les bohémiens d’Aragon jouissent d’une vie toute aussi libre, tournée vers le plaisir de la danse (V.10) et de l’alcool (V.9). A quoi s’ajoutent les plaisirs charnels comme ceux que le poète connaîtra avec l’Etrangère si facile qui laisse « sa robe tomb(er) tout de suite » (V.27). Tous ces détails sont très réalistes.

Malgré tout, la vision élogieuse que ces quatre poètes font d’eux les transfigure jusqu’à leur donner une dimension surnaturelle. Dans trois de ces textes, ces personnes  disent la bonne aventure. Les bohémiens d’Aragon la disent « pour du piment et du vin doux » (V.7/8). Qui les consulte revient « son destin  dans la paume écrit » (V.16). La Tzigane d’Apollinaire « a prédit l’avenir à un couple d’amoureux » (V.12) et même si elle leur a menti, elle « savait d’avance » (V.1) l’échec de leur amour.

Mais la transfiguration la plus poétique est celle opérée par Baudelaire, par l’image de cette « tribu prophétique aux prunelles ardentes » (V.1). Les bohémiens semblent accéder à une vérité interdite au commun des mortels : pour eux « est ouvert / L’empire familier des ténèbres futures » (V.14). Cette périphrase valorisante insiste sur leur pouvoir de divination. Ils sont chéris des dieux, notamment de « Cybèle, qui les aime » (V.11) et rend leur route agréable. Ainsi tout ce qui se rapporte à eux, même les réalités les plus concrètes, est métamorphosé : le lait des mères devient un « trésor » (V.4) et ils semblent déplorer le matérialisme de l’existence « par le morne regret des chimères absentes » (V.8). Dans leurs rêves, ils rejoignent les aspirations de Baudelaire.

Ainsi ces quatre textes savent harmonieusement allier le prosaïsme d’une existence difficile menée au hasard des chemins et la magie d’une vie libre.

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Corpus « peuples nomades »

Peuples nomades

 

Question :  Le portrait des nomades est-il réaliste  dans ces textes ? Justifiez votre réponse.

 

Texte A –  Bohémiens en voyage

 

La tribu prophétique aux prunelles ardentes

Hier s’est mise en route, emportant ses petits

Sur son dos, ou livrant à leurs fiers appétits

Le trésor toujours prêt des mamelles pendantes.

Les hommes vont à pied sous leurs armes luisantes

Le long des chariots où les leurs sont blottis.

Promenant sur le ciel des yeux appesantis

Par le morne regret des chimères absentes.

Du fond de son réduit sablonneux, le grillon

Les regardant passer, redouble sa chanson ;

Cybèle*, qui les aime, augmente ses verdures,

Fait couler le rocher et fleurir le désert

Devant ces voyageurs pour lesquels est ouvert

L’empire familier des  ténèbres futures.

Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal (1857)

Cybèle :  déesse de la terre et de  la fécondité

 

Texte B –  La Tzigane

 

La tzigane savait d’avance

Nos deux vies barrées par les nuits

Nous  lui dîmes adieu et puis

De ce puits sortit l’Espérance

L’amour lourd comme un ours privé

Dansa debout quand nous voulûmes

Et l’oiseau bleu perdit ses plumes

Et les mendiants leur Ave

On sait très bien que l’on se damne

Mais l’espoir d’aimer en chemin

Nous fait penser main dans la main

A ce qu’a prédit la tzigane.

Guillaume Apollinaire, Alcools (1913)

 

Texte C  –   L’Etrangère[1]

 

Il existe près des écluses

Un bas quartier de bohémiens

Dont la belle jeunesse s’use

A démêler le tien du mien

En bande on s’y rend en voiture

Ordinairement au mois d’août

Ils disent la bonne aventure

Pour du piment et du vin doux

On passe la nuit claire à boire

On danse en frappant dans ses mains

On n’a pas le temps de le croire

Qu’il fait grand jour et c’est demain

On revient d’une seule traite

Gai sans un sou vaguement gris

Avec des fleurs plein les charrettes

Son destin dans la paume écrit

J’ai pris la main d’une éphémère[2]

Qui m’avait suivi dans ma maison

Elle avait les yeux d’outre-mer

Elle en montrait la déraison

Elle avait la jambe légère

Et de longues jambes de faon

J’aimais déjà les étrangères

Quand j’étais un petit enfant

Celle-ci parla vite vite

De l’odeur des magnolias

Sa robe tomba tout de suite

Quand ma hâte la délia

En ce temps-là j’étais crédule

Un mot m’était promission[3]

Et je prenais les campanules

Pour les Fleurs de la  Passion

A chaque fois tout recommence

Toute musique me saisit

Et la plus banale romance

M’est éternelle poésie

Nous avions joué de notre âme

Un long jour une courte nuit

Puis au matin bonsoir Madame

L’amour s’achève avec la pluie.

Louis Aragon, Le Roman inachevé (1956)

 

 

Texte D   –  Les Nomades[4]

Ils sont nés près de Barcelone

Ils ont grandi en  Australie

Ils se sont aimés à Paris

Mais ils s’en vont encore d’ici

Les nomades

Ils ont habité la roulotte

Les quatre planches qui cahotent

De Saint-Ouen aux Saintes-Maries

Mais ils s’en vont encore d’ici

Les nomades

Ni la couronne d’oranger

Ni la cheminée de faux marbre

Ne leur mettent racines aux  pieds

Ils ne sont pas comme les arbres

Les nomades

 

Ils vont toujours de ville en plaine

Il n’y a rien qui les retienne

Eux c’est la route qui les mène

En dimanche comme en semaine

Les nomades

Ils ont eu froid comme personne

Ils ont chanté mieux que nous tous

Mais c’est la route qui les pousse

Avec des fifres[5] à leurs trousses

Les nomades

Qu’ils soient venus du fond des  âges

Tous les gitans tous les tziganes

Un violon leur a brisé l’âme

Ils en gardent parfois des larmes

Les nomades

 

Ni la peur de mourir un jour

Dans quelque ville frontalière

Sans tenir la main d’un amour

Ne les arrête sur la terre

Les nomades

Et quand on voit sous les platanes

Passer les mulets et les ânes

On a beau être des profanes[6]

On voudrait suivre la caravane

Des nomades

Michèle Senlis, Les Nomades (1961)


[1] L’Etrangère : est le titre donné par le compositeur Léo Ferré, qui  a choisi dix des quarante-deux strophes du poème initial.

[2] Ephémère : étymologiquement, qui ne dure qu’un jour.

[3] Promission : promesse

[4] Les Nomades : poème mis en musique par Jean Ferrat en 1964.

[5] Fifres : joueurs de flûte

 

 

[6] Profanes : non initiés, ignorants

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Lecture analytique du texte d’Apollinaire, « L’Emigrant de Landor Road »

Véronique Perrin

Lycée Voltaire Wingles

« L’Emigrant de  Landor Road », G. Apollinaire

 

Questionnaire préparatoire

  1. Résumer l’histoire de l’émigrant en réunissant tous les éléments narratifs que vous trouvez dans ce poème. (3 pts)
  2. Que représente l’Amérique pour cet homme ? Justifiez votre réponse en vous appuyant sur des citations commentées. (2 pts)
  3. Comment comprenez-vous l’importance accordée au costume dans ce poème ? (2 pts)
  4. Montrez que le paysage urbain et le paysage marin comportent tous deux des éléments de mauvais augure. (3 pts)

 

Introduction

Guillaume Apollinaire (1880- 1918),mort de la grippe espagnole après avoir survécu au front, est un homme d’origine polonaise, doté d’une solide culture antique. Il a été précepteur en Allemagne, en 1901, où il a rencontré Annie Playden, dont il est tombé amoureux. Revenu en France, il a fréquenté les artistes cubistes (dont Picasso) et il  était critique d’art et poète. Sa poésie est novatrice, notamment dans  Alcools qu’il publie en 1913. Ce recueil présente deux cycles consacrés à deux femmes qu’il a aimées : Annie Playden et Marie Laurencin.

« L’Emigrant de Landor Road » (1904) est un poème appartenant au premier cycle. Apollinaire apprend qu’Annie , avec qui il a eu une liaison en Allemagne, quitte l’Angleterre  pour s’installer en Amérique. Le titre du poème évoque la rue où elle habitait à Londres et où le poète s’est rendu plusieurs fois. Ce texte est empreint de  la tristesse d’Apollinaire, séparé définitivement de celle qu’il aime. L’émigrant est à la fois la femme qui part et l’amant délaissé. Le poème retrace l’itinéraire physique et psychologique d’un homme qui court à sa perte.  Ce texte a été publié en 1905 mais il sera réécrit, en 1906, successivement en prose puis à nouveau en vers.

Problématique  : comment le poète exprime-t-il sa souffrance d’amant délaissé  à travers l’aventure de l’émigrant ?

 

I.                   Un poème narratif moderne

Cet axe vise à montrer la modernité de l’écriture d’Apollinaire.

1.     Les composantes narratives →  un poème qui se lit comme une histoire

–          Un texte résumable, qui use des temps du récit (passé simple ; imparfait). La structure chronologique est soulignée par des adverbes : demain (V.9) Puis (V.29). Après les préparatifs, nous assistons au départ de l’émigrant.

–          Point de vue narratif : un personnage observé de l’extérieur  (« il ») par un narrateur omniscient (strophes 1, 5 par exemple). Certaines strophes nous plongent dans les pensées de l’émigrant (strophes 3, 4, dernière strophe) par une sorte de monologue intérieur (je + temps de l’énonciation). Le narrateur a la faculté d’alterner les regards : point de vue du quai (strophe 8)  et point de vue du bateau (strophe 10)

–          Un cadre spatio-temporel précis :  un port d’automne (V.29) ; des lieux décrits pour créer une atmosphère (strophe 2)

–          Présence d’un personnage : l’Emigrant. Il est croqué en quelques traits physiques, un peu humoristiquement, par deux détails qui lient deux extrêmes (la tête et les pieds)  : Le chapeau à la main, il entra du pied droit (V.1). Il prend de l’épaisseur par ses propos rapportés (strophes 3 et 4) et ses pensées (strophe 11).

 

2.     La modernité poétique

–          On retrouve  des éléments  de versification classique : les strophes sont le plus souvent composées d’alexandrins ;  présence de rimes.

–          Mais il y a entorse à la règle (transition vers une poésie qui s’affranchit des contraintes formelles) :

  •  Distiques, tercets, quatrains se juxtaposent
  • Présence d’hexasyllabes (strophe 6) ; d’octosyllabes (V. 10, V.44, etc.) au milieu des alexandrins
  • Les systèmes de rimes se mêlent : suivies (strophe 1) ; croisées (strophe 3) ; embrassées (strophe 2)
  • On retrouve même de simples assonances : droit / roi (V.1/2)
  • L’absence de ponctuation

–          Un mélange de registres surprenant : le vocabulaire le plus prosaïque (Sur le pont du vaisseau il posa sa valise / Et s’assit – V.31/32) s’allie aux images hermétiques fréquentes en poésie (strophe 7) ; les répétitions les plus plates (vêtus comme il faut qu’on se vête – V. 4) avoisine la créativité poétique : néologisme «feuilloler » (V.30)

 

II.                L’espoir d’un homme

1.     Endosser une nouvelle identité :

–          Le départ est envisagé comme une possible renaissance. Habillé de neuf  (V.15) signifie « faire peau neuve ». L’émigrant pense que l’habit fait le moine : s’habiller  comme un millionnaire (V.20), chez un tailleur très chic et fournisseur du roi (V.2), avec le vêtement d’un lord (V.19)  est promesse d’enrichissement. Avec humour d’ailleurs, il entre dans la boutique du pied droit (V.1), pour  attirer la chance. Tant qu’on n’est pas vêtu comme il faut qu’on se vête (V.4), c’est-à-dire qu’on ne présente pas les signes extérieurs de richesse,  la réussite ne peut venir.

–          Il semble vouloir faire table rase du passé : Les boursiers ont vendu tous mes crachats d’or fin (V.14). Il a donc vendu ses vers précieux, d’or fin. L’oxymore étonne : dans la nouvelle société mercantile, dominée par les boursiers,  tout se vend, y compris la poésie. L’argent lui permet de partir en Amérique (V.9), où il espère aussi en gagner d’autre (V.11). D’ailleurs les prairies lyriques (V.11) suggèrent  que  le nouveau monde  sera  une nouvelle source d’inspiration. Nouvelle source de profit. (vision moderne de la poésie, qui n’est plus coupée de la réalité économique.

2.     L’Amérique, un pays de cocagne

–          Suivant les clichés, l’Amérique est le lieu de tous les possibles :  c’est la terre dont on ne revient pas , car on peut s’y réaliser pleinement.

–           L’émigrant est catégorique, ce que marque le futur de l’indicatif et l’adverbe « jamais » :  Et je ne reviendrai jamais  (V.10) . Il part, gonflé d’espoir et de certitudes. Les formules sans appel marquent sa détermination  :  Car revenir c’est bon pour un soldat des Indes (V.13) ;  je veux … (V.15) A l’opposé du voyage colonial,  il envisage une vraie aventure, réinvente un nouveau monde, un nouvel ordre social.  L’auteur  pense très certainement au poème de Kipling,  « Mandalay », publié en 1904, dans la revue « Les Soirées de Paris »,  dont Apollinaire s’occupait.

–          Il véhicule des clichés de l’Amérique : les grands espaces,  naturels et encore sauvages,  deviennent des prairies lyriques (V.11), source d’inspiration et de liberté.  La description qu’il en fait est empreinte d’exotisme  : Sous des arbres pleins d’oiseaux muets et de singes (V.16).  L’existence y semble paradisiaque et oisive : dormir  (V.15).

3.     Quitter une terre de souffrance

–          Le poème traduit une  déception  amoureuse. La nostalgie habite l’émigrant et le poète : parmi ces rues que j’aimais (V.12) , il y a Landor Road (titre), rue où habitait Annie. Le « je » est enchaîné à son passé : Au-dehors les années (…) / passaient enchaînées (V.21/24) Ce quatrain en hexasyllabes est une vision échappée du poète (plus que de l’émigrant). L’idée de l’amour défunt est reprise dans l’image des journées veuves (V.25)  et de l’évocation de la femme du diable (qui) a battu son amant (V.28). La femme, démoniaque, impose à l’homme une terrible souffrance, voire un martyre puisque Les vendredis sanglants et lents d’enterrements (V.26) suggèrent la Passion du Christ, endurée le Vendredi saint. A nouveau l’assonance en « an » et la longueur des mots  renforcent le ton plaintif. Le sang coule ; cela reprend l’image de décollation des mannequins (V.3) Le vers 27, énigmatique, poursuit l’image de la défaite (vaincus) : s’agit-il des nuages, décrits par antithèses (De blancs et de  tout noirs) qui crèvent quand le ciel se met à pleuvoir ?

–          L’émigrant est noyé  dans une foule indifférente  (strophe 2). Constituée d’ombres sans amour (V.6), elle est à l’unisson du personnage, qui se qualifie lui-même d’ombre aveugle (V.12) . L’impression de nombre (cf.  les déterminants pluriels :  des ombres, des mains, des oiseaux) et d’anonymat l’emportent . L’ambiance est  pesante : les ombres sans amour qui se traînaient par terre  (V.6) évoquent des damnés,  qui errent l’âme en peine, sans trouver de repos. Leur plainte se fait entendre par l’allitération en « m » et l’assonance en « an » :  La foule en tous les sens  remuait en mêlant… (V.5) . La confusion règne : en tous les sens ; mêlant. C’est le chaos, le paysage de la chute.

–          Mais aux deux  premiers vers, désespérés, de la strophe 2 s’opposent les deux suivants, qui sont porteurs d’espoir. Le mouvement y est ascensionnel : des mains vers le ciel (…)  s’envolaient (V.7/8). Les ombres fantomatiques se sont réincarnées métonymiquement (les mains), qui s’élèvent vers le ciel, en signe de prière ? Le ciel est plein d’espoir puisque plein de lacs de lumière (V.7) . La confusion eau-air (lac de lumière) fait communier harmonieusement les éléments. Les oiseaux blancs, auxquels les mains sont comparées,  évoquent  la  liberté. Ainsi les signes d’adieu que les gens sur le quai adressent aux migrants sont optimistes  et le voyage est une promesse de rédemption.

 

=>   Loin d’être une renaissance, l’émigrant vogue vers la mort.

 

III.             Un voyage -sans retour- vers la mort    

1.     Les mauvais présages

–          D’emblée l’échec du voyage est annoncé par les mauvais présages.

–          Le  commerçant qui venait de couper quelques têtes / De mannequins  (V.3/4). L’enjambement s’amuse à ménager le suspense sur l’identité des victimes (V.23)  : des mannequins mais ils symbolisent l’homme puisqu’ils sont personnifiés et  vont se déshabill(er) (V.17) pour lui. Le geste est violent puisqu’ils batt(ent) leurs habits (V.18)

–          Autre mauvais présage : l’émigrant endosse le vêtement d’un lord mort sans avoir payé (V.19). Il endosse donc le costume d’un défunt, apparemment ruiné. De plus l’achat au rabais (V.20) augure mal  de la possibilité de devenir millionnaire : aux  deux extrémités du V.20, ces termes quelque peu opposés créent une impression dissonante.

–          L’attitude des autres migrants augurent mal du voyage : Des émigrants tendaient vers le port leurs mains lasses / Et d’autres pleurant s’étaient agenouillés (V.35/36) Il y a une opposition entre le dynamisme du verbe « tendre » et le qualificatif « lasses ». Ils subissent leur sort et ne partagent pas l’optimisme des gens restés à quai.  Eux aussi prient (agenouillement) mais, ainsi terrassés, n’implorent-ils pas plutôt une protection ?

–          Le départ en automne, saison où la nature agonise. Les feuilles indécises (V.29) vacillent avant de tomber au sol : elles aussi sont mortes. Le néologisme « feuilloler » (V.30) associe le tremblement des mains à cette chute. Nouveau signe funeste.

–          Une fois embarqué, l’émigrant regarda  longtemps les rives qui moururent (V.37) ; le paysage s’estompe et meurt donc. Tout est fragilisé et trembl(e)  à l’horizon. (V.38) .

 

2.     L’échec

–          L’utilisation de l’irréel du passé, il aurait voulu (L.41) souligne l’écart entre le souhait et la réalité. C’est le signal d’un échec : il rêve d’un voyage ludique : Jouer  dans d’autres mers  parmi les dauphins (V.43). Mais au lieu d’un jouet d’enfant (des bateaux d’enfant – V.38) , c’est un vrai navire qui l’emporte. Au lieu des dauphins amicaux , ce sont des squales (V.50) qui l’attendent ! Poissons sinistres qui guett(ent) de loin avidement / Des cadavres (V.51/52)  L’enjambement diffère de manière inquiétante la révélation de ce qu’ils convoitent.  En fait les cadavres de jours rongés par les étoiles (V.52) désignent sûrement poétiquement la nuit, moment où le squale attaque ; l’image est morbide.

–          D’ores et déjà, on sait que le rêve de réussite a avorté :   il aurait voulu ce bouquet comme la gloire (V.42)  il ne fera pas fortune.

–          L’espoir de faire table rase du passé est aussi vain : faire taire les souvenirs est impossible. Il veut noyer (V.46)  ces tisseuses têtues qui sans cesse interrogent (V.47) : s’agit-il des Parques qui tissent les fils du destin de l’homme (l’une tient le fil, l’autre le met sur le fuseau alors que la dernière le coupe, au moment de mourir) ? L’image du tissage est reprise aux V.44 /46:  Et l’on tissait dans sa mémoire / Une tapisserie sans fin / qui figurait son histoire.  Donc passé (mémoire) et avenir (interroger) se confondent. Le futur ne fera que réécrire le passé. Le temps cyclique l’inscrit dans un mouvement tragique.  La tapisserie sans fin appelle l’image de Pénélope , l’épouse d’Ulysse. Tel le héros épique, l’émigrant est condamné à errer sur les océans ; (son) ombre aveugle (V.12) est le jouet du destin. Le pronom indéfini « on » (V.44) dirige sa destinée à sa place.  Mais lui ne connaîtra pas l’issue heureuse de l’Odyssée.

 

3.     Se marier à la mer / à la mort

–          Il se maria comme un doge (V.48) Apollinaire fait référence à une tradition vénitienne qui a perduré  jusqu’au XVIIIème s : cérémonie annuelle au cours de laquelle le doge (le chef) allait sur la mer pour l’épouser symboliquement, en y jetant un anneau. Par ce geste, il réaffirmait la domination de Venise sur la mer, d’où venaient les barbares.

–          L’émigrant se marie aux cris d’une sirène moderne sans époux (V.49) : épouse-t-il une sirène, c’est –à-dire une illusion ?… S’il s’agit d’une sirène moderne, est-ce la sirène du bateau :  ses cris, c’est-à-dire sa signalisation sonore , a quelque chose de déchirant. C’est un mariage illusoire (sans époux), connoté à la souffrance.

–          L’émigrant semble donc accomplir son ultime voyage : les vents l’embrassent : Les vents de l’Océan (…)  Laissaient dans ses cheveux de longs baisers mouillés (V.33/34) mais ils sont funestes : en soufflant leurs menaces (v.33). L’amour (Eros) et la mort (Thanatos) se confondent. Lui-même semble appeler la mort quand il interpelle la  mer : Gonfle-toi vers  la nuit Ô Mer (V.50) (la nuit = le néant de la mort). Les derniers vers sont morbides : cadavres (V.52) derniers serments (V.53). Le tout  petit bouquet flottant à l’aventure (V.40) sur l’océan peut faire penser aux fleurs qu’on jette en souvenir là où les disparus ont péri. Bien que « tout petit », il finit par couvr(ir) l’Océan d’une immense floraison (V.41), comme si la mort recouvrait tout.

 

Conclusion

–          Transposition de la souffrance du poète sur l’émigrant, qui a la particularité de renvoyer aussi bien à Annie Playden, qui émigre, qu’à Apollinaire, qui souffre de ce départ. (un lyrisme pudique)

–          Une poésie qui ne nie pas l’héritage classique, tant dans sa forme versifiée que dans l’évocation de mythes antiques mais  qui ouvre la voie de la modernité. Apollinaire est le chantre d’une nouvelle ère.

–          Un mélange de tonalités  : l’évocation humoristique de la boutique du tailleur cohabite avec le registre tragique des mauvais présages et des nombreuses  notations morbides

–          Nombre de poèmes d’Apollinaire (le mal aimé)  traduisent ses échec amoureux successifs : Annie Playden, Marie Laurencin, Lou.

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Apollinaire, « L’Emigrant de Landor Road »

L’Emigrant de Landor Road

A André billy



Le chapeau à la main il entra du pied droit
Chez un tailleur très chic et fournisseur du roi
Ce commerçant venait de couper quelques têtes
De mannequins vêtus comme il faut qu’on se vête

La foule en tous les sens remuait en mêlant                                                                                           Des ombres sans amour qui se traînaient par terre                                                                                 Et des mains vers le ciel plein de lacs de lumière                                                                     S’envolaient quelquefois comme des oiseaux blancs

Mon bateau partira demain pour l’Amérique
Et je ne reviendrai jamais
Avec l’argent gagné dans les prairies lyriques
Guider mon ombre aveugle en ces rues que j’aimais

Car revenir c’est bon pour un soldat des Indes
Les boursiers ont vendu tous mes crachats d’or fin
Mais habillé de neuf je veux dormir enfin                                                                                             Sous des arbres pleins d’oiseaux muets et de singes

Les mannequins pour lui s’étant déshabillés
Battirent leurs habits puis les lui essayèrent
Le vêtement d’un lord mort sans avoir payé
Au rabais l’habilla comme un millionnaire

Au-dehors les années
Regardaient la vitrine
Les mannequins victimes
Et passaient enchaînées

Intercalées dans l’an c’étaient les journées veuves
Les vendredis sanglants et lents d’enterrements
De blancs et de tout noirs vaincus des cieux qui pleuvent
Quand la femme du diable a battu son amant

Puis dans un port d’automne aux feuilles indécises
Quand les mains de la foule y feuillolaient aussi
Sur le pont du vaisseau il posa sa valise
Et s’assit

Les vents de l’Océan en soufflant leurs menaces
Laissaient dans ses cheveux de longs baisers mouillés
Des émigrants tendaient vers le port leurs mains lasses
Et d’autres en pleurant s’étaient agenouillés

Il regarda longtemps les rives qui moururent
Seuls des bateaux d’enfant tremblaient à l’horizon
Un tout petit bouquet flottant à l’aventure
Couvrit l’Océan d’une immense floraison

Il aurait voulu ce bouquet comme la gloire
Jouer dans d’autres mers parmi tous les dauphins
Et l’on tissait dans sa mémoire
Une tapisserie sans fin
Qui figurait son histoire

Mais pour noyer changées en poux
Ces tisseuses têtues qui sans cesse interrogent
Il se maria comme un doge
Aux cris d’une sirène moderne sans époux

Gonfle-toi vers la nuit Ô Mer Les yeux des squales
Jusqu’à l’aube ont guetté de loin avidement
Des cadavres de jours rongés par les étoiles
Parmi le bruit des flots et les derniers serments

 

Guillaume Apollinaire, Alcools (1913)

lecture  analytique L’Emigrant de Landor Road »

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Lecture analytique « Le spleen de Casablanca » Laâbi

Véronique Perrin

Lycée Voltaire wingles

Lecture analytique n°3 – Le Spleen de Casablanca, Laâbi (1996)

 

Introduction :

Ecrivain marocain de langue française, né à Fès en 1942, dans une famille d’artisans, Abdellatif Laâbi a été professeur de français. Il a participé à la création du  Théâtre universitaire marocain , en 1963, et a fondé, en 1966, avec d’autres poètes marocains, la revue « Souffles » (Anfas en arabe). Parallèlement, il s’est impliqué dans l’action politique, s’opposant au régime du roi Hassan II. En 1972, il est arrêté, torturé, mis en prison. Il passera plus de huit ans incarcéré. En 1985, il quitte le Maroc pour la France, où il poursuit sa carrière littéraire et devient traducteur.

Bibliographie : Le soleil se meurt (poésies – 1992) ; L’Etreinte du monde (poésies, 1993) ; Exercices de tolérance (théâtre – 1993) ; Le Juge de l’ombre (théâtre – 1994) ; Le Spleen de Casablanca (poésies – 1996).

A propos du Spleen de Casablanca, A. Laâbi écrit : « Ce livre est celui d’un tournant. Ecrit pour une part au Maroc, pour l’autre en France, il se déroule comme le journal de bord d’un impossible retour. Le pays que j’ai cru retrouver s’éloigne et m’éloigne de nouveau. La séparation a, cette fois-ci, le goût amer de la perte. J’ai cessé de chercher une place, ma place quelque part. »

 

Problématique : Comment le poète exprime-t-il l’expérience traumatisante du retour d’exil ?

 

I.                   La perte des racines

Le poème se construit sur une situation inattendue : alors que le retour au pays natal devrait être joyeux, Casablanca n’est plus rien pour lui.

1.     La description de Casablanca

–          Le lieu est désagréable : le recueil s’ouvre sur le bruit de la ville, comme une agression.

–          Les notations descriptives sont brèves et sèches : les immeubles cachent le soleil ; les voitures règnent / comme n’importe quel tyran ;   les trottoirs sont défoncés. les arbres font pitié. La personnification des deux premiers éléments par les verbes utilisés leur donne des intentions néfastes.

–          La périphrase de la cité de ciment et de sel, qui évoque la proximité de la mer, insiste sur le caractère inhospitalier des lieux par les compléments de matière.

–          Casablanca n’est que l’ombre d’elle-même : elle est l’exact cliché inversé d’une ville méditerranéenne ensoleillée : tant l’été se confond avec l’hiver. Elle est marquée par la grisaille (ce gris matin).

–          De retour, le poète semble devoir faire le deuil de sa ville natale : en ce petit matin, le poète est sensible à la douleur qu’il recueille / (à) la gerbe de doutes qu’il (lui) offre. Couronne mortuaire, recueillement et souffrance se connotent à l’enterrement.

–          Ce paysage atone correspond à l’état d’âme du poète : ce gris matin est loyal / Je lui sais gré du spleen qu’il répand.  

–          Le poète est saisi de doutes quant à son retour.

 

2.     La coupure  face aux racines

–          Le divorce semble consommé face à la culture dont il ne partage pas les valeurs machistes : les cafés sont  réservés aux hommes : les femmes, à raison /  ont peur qu’on les regarde.  La locution adverbiale « à raison » le signale.

–          Casablanca se connote aussi dans son esprit à la dictature qu’il a subie puisque la comparaison à n’importe quel tyran pour qualifier les voitures paraît un peu inopinée.

–          Il s’agit pourtant du retour au  pays de (leur)  jeunesse. Le lieu devrait donc être chargé d’émotions et de nostalgie. Il n’en est rien.

–          Le retour d’exil est vécu comme un apprentissage difficile, et non comme une émotion instantanée : j’apprends le dur tier du retour ; J’essaye de vivre /  la tâche est ardue. Les mots attachés au labeur surprennent et les sonorités dures renforcent la difficulté.

–          Le poète subit les conséquences de l’exil, qui  détruit la capacité de s’émouvoir, par nécessité peut-être de s’endurcir. Le siècle prend fin / dit-on / Et cela me laisse indifférent. Loin d’être une expérience enrichissante, une source de découvertes,  l’exil anesthésie :  Ô comme les pays se ressemblent / et se ressemblent les exils. Le chiasme donne une impression de miroir : « pays » et « exils » se reflètent de part et d’autre du verbe « se ressembler ». Rien n’a de goût.

–          Le poète ne se sent ni sédentaire ni nomade : je ne suis pas ce nomade / qui cherche le puits / que le sédentaire a creusé. Il est plus marginal que les peuples marginaux : Je bois peu d’eau / et marche / à l’écart de la caravane. L’exil a fait de lui un nomade contraint qui n’aspire plus à rencontrer / à retrouver le sédentaire. Il ne cherche plus à réintégrer quelque groupe que ce soit.

 

=> L’exil est donc une expérience traumatisante qui détruit l’individu.

 

II.                La perte d’identité

1.     Un homme dépossédé

–          Sa poche crevée suggère un certain dénuement,  qui rappelle la misère du poète de « Ma Bohème » (Rimbaud), la joie de l’errance en moins.

–          Les nombreuses constructions négatives ou restrictives renforcent cette impression de manque : je n’ai que ta main (l’amour) ; tes pas ne sont pas… ; sans passer ; j’ai de rendez-vous avec personne ; je ne suis pas ce nomade… ; Quoique le suivant / ne me dise rien qui vaille ; mes idées n’ont plus d’ombre ni d’odeur ; il n’y a plus que ma tête.

–          Le poète semble aussi dépossédé tour à tour (au fil de ses déménagements ?) de ses amis : Et j’ai peur, très peur / de perdre encore un vieil ami. Il vit cela comme une déchirure (J’ai peur, très peur) puisque la foi en l’autre semble le dernier espoir qui l’anime (je cherche dans les  yeux une lueur / un  bourgeon dans les paroles). Mais la fuite du temps se mesure  par l’effacement progressif des êtres qui nous entourent : Visage après visage / meurent les ans. Ces disparitions condamnent l’espoir. je n’ai de rendez-vous / avec personne.

–          C’est un homme sans désir :  il ne semble plus avoir soif symboliquement de connaissances : je bois peu d’eau. Il ne cherche plus le puits (celui au fond duquel  la vérité serait cachée selon l’expression ?)

 

2.     Un homme désincarné

–          Il revêt une apparence fantomatique : Mon corps a disparu ; n’a plus d’existence biologique (je bois peu d’eau). Son corps semble mort : Il n’y a plus que ma tête.

–          Il se réfugie dans le monde de la pensée, mais c’est une pensée totalement déconnectée de la réalité : Mes idées n’ont pas d’ombre pas plus d’odeur. Est-ce une manière de sous-entendre qu’en pensée, il n’aspire même plus aux bonheurs terrestres et sensuels ?

–          Cet homme dématérialisé ne laisse plus d’empreinte nulle part : Tes pas ne sont pas de ces pas / qui laissent des traces sur le sable. A force d’être partout, il est nulle part. Il « passe ». Le sable est  symbolique de la mouvance et de l’instabilité et de la traversée du désert. Dans tu passes sans passer, on peut aussi entendre  « sans passé ».

 

=>   Si l’homme se dématérialise, il en va de même de  son écriture.

 

III.             L’écriture poétique : une expérience du silence

1.     L’exil intérieur

–          Ce poème lyrique est saturé de « je ». Le vocatif  « ô » et l’adverbe exclamatif  « comme » lui donnent une tonalité élégiaque.

–          Dans le premier texte, le « tu » auquel s’adresse le poète est  une personne à part entière (la femme aimée ?…) : je n’ai que ta main pour réchauffer la mienne. Mais très vite ce pronom personnel semble l’alter ego du poète (cf. le deuxième texte) : enfermé en lui-même, le poète soliloque.

–          En effet, à qui  s’adressent les questions sans réponse : Si je sors / Où irai-je ?  –  Où s’en est allé, dis-moi / le pays de notre jeunesse ? Le « tu » semble être interchangeable et ainsi perd donc toute existence réelle.

–          Une réalité demeure toutefois : celle de l’écriture refuge : ma grotte est en papier. L’auteur attendrait tout de la parole : Je cherche (…) un bourgeon dans les paroles. Mais puisque le lien à l’autre se perd ; reste donc la parole pour soi, l’écriture. Là aussi,  la matière du papier suggère un refuge fragile : que peut cette grotte contre la ville de ciment ? La métonymie de la plume désigne l’écriture, là encore, de façon légère, même s’il en possède une bonne provision. Ecrire pour essayer (envers et contre tous) de vivre, ce n’est pas gagné : la tâche est ardue.

 

2.     La mort de la poésie ?

–          La poésie paraît elle-même se détruire : moderne, sans ponctuation, en vers libres et blancs, elle se rapproche quelque peu de la prose.

–          Son vocabulaire est assez prosaïque, très simple : Les trottoirs sont défoncés – Et de quoi faire du café.  L’expérience destructrice de l’exil se marierait mal avec une esthétique de la préciosité.

–          Certains vers sont très courts (deux syllabes : Et puis – dit-on), antipoétiques au possible. L’écriture s’essouffle.

–          La mise en page souligne l’expérience du vide par la grande place accordée au blanc. En haut de page, les poèmes évoquent Casablanca ; ceux d’en bas, plus brefs, prennent un caractère plus existentiel. Le pessimisme domine. Je me sentirai perdu / à tout âge. – le (siècle) suivant / ne me (dit) rien qui vaille.

–          La poésie est en passe de se dissoudre, à l’instar des vers suivants : Tes pas ne sont pas de ces pas / qui laissent des traces sur le sable / Tu passes sans passer. Les deux homophones « pas » se confondent et ils se dissolvent dans le verbe « passer ». L’impression auditive est indifférenciée. L’assonance en « a » et l’allitération en « s »  renforcent cette impression. Les sons, doux, s’amenuisent : tout comme le poète, c’est à peine si la poésie laisse des traces sur le papier.

 

Conclusion :

–          Poème lyrique profondément douloureux : l’exil est une déchirure irrévocable ; le retour au pays n’est plus guérison.

–          Les racines sont à jamais perdues.

–          Expérience d’une destruction de soi. Le poète semble écrire pour exister encore mais même l’écriture poétique semble vouée à disparaître.

–          Le poète ne peut plus se réfugier dans la nostalgie du passé comme Du Bellay a pu le faire en écrivant Les Regrets.

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Abdellatif Laâbi, Le Spleen de Casablanca

 Page 1 

Dans le bruit d’une ville sans âme

j’apprends le dur métier du retour

Dans ma poche crevée

je n’ai que ta main

pour réchauffer la mienne

tant l’été se confond avec l’hiver

Où s’en est allé, dis-moi

le pays de notre jeunesse ?

O comme les pays se ressemblent

et se ressemblent les exils

Tes pas ne sont pas de ces pas

qui laissent des traces sur le sable

Tu passes sans passer

 

Page 2

Visage après visage

meurent les ans

Je cherche dans les yeux une lueur

un bourgeon dans les paroles

Et j’ai peur, très peur

de perdre encore un vieil ami

Ce gris matin est loyal

Je lui ais gré du spleen qu’il répand

de la douleur qu’il recueille

de la gerbe des doutes qu’il m’offre

en bon connaisseur

 

Page 3

Si je sors

où irai-je ?

Les trottoirs sont défoncés

Les arbres font pitié

Les immeubles cachent le ciel

Les voitures règnent

comme n’importe quel tyran

Les cafés sont réservés aux hommes

Les femmes, à raison

ont peur qu’on les regarde

Et puis

je n’ai de rendez-vous

avec personne

Je me sentirai perdu

à tout âge

 

Page 4

Je ne suis pas ce nomade

qui cherche le puits

que le sédentaire a creusé

Je bois peu d’eau

et marche

à l’écart de la caravane

Le siècle prend fin

dit-on

Et cela me laisse indifférent

Quoique le suivant

ne me dise rien qui vaille

 

Page 5

Dans la cité de ciment et de sel

ma grotte est en papier

J’ai une bonne provision de plumes

et de quoi faire du café

Mes idées n’ont pas d’ombre

pas plus d’odeur

Mon corps a disparu

Il n’y a plus que ma tête

dans cette grotte en papier

J’essaye de vivre

La tâche est ardue

 

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Commentaire du texte de D. Diop

Véronique Perrin

Lycée Volatire Wingles

« Le Renégat », David Diop (Coups de pilon  – 1956)

                                                               Le portrait du renégat

1.     Qui est le renégat ?

–          Titre = qualification péjorative d’emblée

–          Mon frère → l’auteur étant africain, le renégat = Africain ayant quitté / renié  sa terre natale

le soleil de ton pays n’est plus qu’une ombre  (antithèse soleil / ombre) →  pays oublié

–          Honte de ses origines :  La case de ta grand-mère / Fait rougir un visage… (V.9/10)   = le « rouge de la honte sur le visage du renégat, qui se veut  civilisé (V.8) = occidentalisé

2.     Son portrait physique

–          Portrait par métonymies : dents, lunettes, yeux, front, épaules

–          Insistance sur les signes extérieurs de richesse : lunettes d’or  (V.2) ; smoking à revers de soie (V.4)  (en relief en fin de vers) => réussite sociale en Occident

–          Or – soie – dents qui brillent (V.1) => tout ce qui brille ; l’apparence

–          Faire le beau dans les salons (monde bourgeois) : Piaillant et susurrant et plastronnant dans les salons  (V.5) – long vers peu harmonieux (mots longs +  assonance en « ant » des participes présents ) ; bavardage inutile (piaillant)  // mots sonores et vides (V.11) = se faire remarquer sans rien avoir à dire.

=> Dans ces salons le renégat est un pantin ridicule. Caricature

3.     Un être dénaturé

–          Des signes extérieurs de richesse appartenant tous aux sociétés occidentales (ex. smoking) ; le mot revers (V.4) suggère le revers de la médaille : la nature du renégat  est autre.

–          Mimétisme stupide (copier les Blancs) au point de vouloir changer de facies : visage blanchi (V.1O) ; yeux rendus bleus (V.3) = se  fondre dans le décor

–          Ou bien un Noir qui rejoue la caricature du Noir : dents qui brillent sous le compliment (V.1) = sourire légendaire de  Banania ; correspondre à ce que veulent les Blancs

=>  Un seul but = plaire aux Blancs. →  susurrant (V.5) = leur dire des paroles doucereuses, pour s’en faire accepter

En oubliant ses racines, le Noir a perdu son âme. Il choisit une culture au détriment d’une autre,  valorisée par Diop.

II.                Un rapport de force entre deux mondes

1.     L’Opposition de deux mondes

–          A partir du vers  6 → second mouvement dans le poème : confrontation des  deux  univers

–           Antithèse :  salons   (V.5) ≠ case (V.9) – lieux bourgeois ≠ pauvreté ;   lieu du paraître ≠ lieu des sentiments vrais (grand-mère), des origines ; lieu qui sonne faux  ≠ lieu des vraies valeurs  => valorisation de  l’Afrique

–          Autre valorisation de l’Afrique :  pays lumineux →  soleil  (V.7) ; l’ocre rouge des terres (V.13)   ≠   ombre

(Occident). Hommage à l’Afrique  rouge  = pays martyr où le sang a souvent coulé

–          2 présences humaines : l’Occident = maître (V.3) ≠ l’Afrique = grand-mère (V.9)  => rapport de domination (héritage de l’esclavage)  ≠ rapport affectif.

2.     Une mauvais relation instaurée entre les deux civilisations

–          Les Blancs vis-à-vis du  renégat : en apparence, acceptation dans leurs Salons  (V.5) ; compliment hypocrite  (V.6) ; en  réalité, mépris (condescendance  -V.5)

–          Le  Noir vis-à-vis des Blancs : naïveté / crédulité : yeux rendus bleus par la parole du maître (V.3) ; croire les mensonges des blancs ; manipulation par le langage (faire croire qu’ils sont pareils) –  Un visage blanchi par les années d’humiliation et de Mea Culpa (V.10) : inconsciemment,  l’humiliation subie (esclavage, colonialisme) marque encore le comportement du Noir   –  Mea Culpa = il se sent fautif (et non victime) → poids du discours religieux des Blancs  (évangélisation de  l’Afrique) ; les Noirs sont coupables d’être païens.

=> Maître  = terme connoté à l’esclavage : malgré l’abolition de l’esclavage, le Blanc = dominant ;  le Noir accepte de le voir comme tel.

Condamnant le racisme des Blancs, Diop fustige tout autant l’attitude servile du renégat qui croit en sa propre infériorité et idéalise le modèle blanc.

III.                          La position  du narrateur

1.     Evolution  du ton

–          Evolution de l’anaphore :  mon frère  (V.1/2) → mon pauvre frère  (V.4) : ton de pitié ? le plaint-il ?

Pauvre ≠  or ; smoking => richesse matérielle  /  misère morale

–          Tu nous fais pitié (V.6) = mépris

Vers court, cinglant = mis en relief (interruption du bavardage creux des  salons  – cf. vers précédent)

Passage du  « je » (mon frère) au  « nous »  => déception de  toute la communauté africaine

–          Condamnation de son attitude servile : moquerie de l’auteur  :  yeux rendus bleus (mensonge trop gros pour être cru) ;

… fait rougir un visage blanchi…. :  mélange du clown auguste  (rouge) et du clown blanc

–          Condamnation de la bonne conscience   du  renégat  : ton front serein de civilisé (V.8) → trahison la paix dans l’âme

–          Poème = éveil de la conscience : apostrophe (mon frère) + marques de 2ème personne (ton pays – ton front – ta grand-mère – tes épaules…) = l’interpeller ; l’accuser ; lui ouvrir les yeux

2.     La prédiction

–          Futur :  tu  fouleras (V.13) – rythmeront (V.14) => prédire le châtiment

–          Retour fatal au pays : repu de mots sonores et vides (V.11) = lassitude de cette vie fausse ;  repu  = dimension animale ; âme perdue → prise de conscience trop tardive

–           Image de l’apatride errant  : ta marche : tu fouleras  + fardeau de la caisse qui surmonte (ses) épaules (V.12)

–          Echec : … vides / comme la caisse qui surmonte tes épaules (V.11/12) = bagage  vide ; aucun bien matériel

–          Souffrance : mots angoissés (V.14) , à la place des mots sonores et vides ; marche inquiète (V.14) Remords ?

–          Afrique = personnification (allégorie) : terre amère et rouge (V.13)  → « amère » = elle lui en veut / vengeance

–          V.15 = finir sur les paroles du renégat => faire entendre son désespoir : Je me sens seul si seul ici ! (ponctuation forte = émotion + adverbe intensif « si » + répétition de l’adjectif « seul » + allitération en « s ») = cri de souffrance : renié à son tour par son continent

 

Commentaire rédigé

Le recueil  Coups de pilon,  dont est extrait « Le Renégat », a été écrit en 1956 par le Sénégalais David Diop. En digne élève de Léopold Sédar Senghor, il met sa plume au service de la dénonciation du colonialisme et se fait le chantre du concept de « négritude », inventé par Aimé Césaire. Mais loin d’incriminer seulement les Blancs, David Diop n’est pas tendre pour dénoncer le comportement indigne de ses frères déracinés. Dans son poème, « Le Renégat », comment l’auteur invite-t-il son peuple à modifier son  rapport au monde occidental ? Tout d’abord D. Diop peaufine le portrait d’un Africain expatrié afin de présenter le rapport de force instauré entre deux continents et deux cultures. Dans cette évocation, il n’hésite pas à afficher une position personnelle incisive et sarcastique.

David Diop qualifie négativement, d’emblée, par son titre le sujet de son poème : « le renégat » est un Africain qui a quitté sa terre pour l’Occident. En l’appelant de façon répétitive  « mon frère », l’auteur souligne leurs origines communes. Mais pour se prétendre « civilisé » (V.8), l’homme a renié sa terre  : « le soleil de (son) pays n’est plus qu’une ombre » (V.7). Par cette antithèse, Diop souligne que l’Afrique n’a plus d’existence réelle aux yeux du renégat. Ce dernier a même honte de ses origines puisque « la case de (sa) grand-mère » (V.9)  le « fait rougir » (V.10).

Ainsi qualifié, le renégat est décrit physiquement. Le portrait fonctionne par métonymies : dents, lunettes, front, épaules sont évoqués donnant l’impression d’un être quelque peu disloqué, sans profondeur. Diop  retient surtout les signes extérieurs de richesse d’un homme qui a réussi socialement en Occident : il  porte des « lunettes d’or » (V.2 ), un « smoking à revers de soie » (V.4)  Placés en fin de vers, ces détails sont mis en valeur à la pause de la rime.  Cette brillance se retrouve dans les dents, au  vers 1 ; le renégat mise tout sur l’apparence clinquante. Il fait le beau dans « les salons» (V.5), « piaillant et susurrant et plastronnant » (V.5). Cette énumération de participes présents  alourdie par la longueur des mots et l’assonance en « an » suggère le caractère gauche de cet homme qui se pavane dans un lieu où il trouve mal sa place. Le verbe « piailler » se connote péjorativement au bavardage inutile, creux et vain,  explicité par les  « mots sonores et vides » (V.11).

Le Noir en Occident fait tout pour se fondre dans le décor, endossant un costume qui lui convient mal. Le terme « revers » (V.4) suggère  le revers de la médaille. A force de mimétisme, comme un singe savant, le renégat se dénature. L’auteur est ironique vis-à-vis de celui qui aspire à avoir un  « visage blanchi » (V.10),  et des yeux « bleus » (V.3), tout en continuant à servir aux Blancs la caricature du Noir qu’ils attendent. Les « dents qui brillent sous le compliment hypocrite » (V.1) évoquent parfaitement le sourire « Banania », symbole du  « bon nègre » des colonies. Le Noir croit aux mensonges des Blancs qui feignent de l’accepter.  A son tour, il leur  « susurr(e) » (V.5)  des paroles doucereuses pour leur plaire.

En perdant ainsi son âme, le renégat choisit une culture contre une autre.  Le poème les confronte.

A partir du vers 6, « tu nous fais pitié »,  le poème entre dans un second mouvement qui confronte deux univers. De façon un peu caricaturale, il oppose  les « salons de la condescendance » (V.5)  des Occidentaux à la « case » (V.9) africaine. L’habitat rudimentaire s’oppose aux lieux  rutilants mais qui sonnent faux.  Ces salons semblent déshumanisés :  le mépris des Blancs est si fort qu’il fait disparaître jusqu’à la présence même des êtres qui l’éprouvent. La seule présence humaine du Blanc dans le texte se manifeste par le mot « maître » (V.3), qui se réfère au  temps de l’esclavage et souligne un rapport de domination. A contrario, la case est celle de « (sa) grand-mère » : c’est le lieu des origines, où le lien affectif est fort. Bien que matériellement pauvre, la terre d’Afrique est riche de liens,  lumineuse avec sa terre ocre « rouge » (V.13),  sous le « soleil » (V.7), quand l’Occident est relégué  dans «l’ombre » (V.7). Si la couleur rouge existe en Occident, elle est celle de la honte, celle du visage qui rougit (V.10). Sentiment vil que ne peut connaître, par essence, un Noir puisqu’il est impossible de rougir avec cette couleur de peau.  Diop valorise son continent dans cette opposition.

Cette confrontation souligne le fait qu’il n’y aura jamais ( ?)  égalité entre les peuples. Si les blancs feignent  d’accepter hypocritement les Noirs,  ils manifestent leur mépris et les Noirs renégats, crédulement,  croient à leur mensonge. Le renégat « gobe »  « la parole du maître » (V.3), y compris quand elle prétend que ses yeux puissent être « rendus bleus » (V.3) Le noir se laisse manipuler par le discours du Blanc, naïvement, comme s’il n’arrivait pas à se défaire du rapport de force qui s’est instauré entre les ethnies depuis le temps de l’esclavage et celui du colonialisme. Le Noir inconsciemment est soumis à la supériorité occidentale. Il a intégré  son infériorité, inculquée « par les années d’humiliation et de Mea Culpa » (V.10) Humilié en tant qu’esclave puis peuple colonisé, le Noir se sent fautif,  pense mériter le châtiment. Si le Blanc l’asservit, c’est qu’il le mérite. L’expression  « mea culpa », toute chrétienne,  suggère l’utilisation de la religion pour endoctriner, en évangélisant les terres africaines, pour façonner la mentalité soumise des Noirs.

Diop dénonce cet état de fait. Il reproche à son frère d’entériner ces discours, de croire en cette infériorité.

La position  du poète  semble évoluer au fil du poème. Le texte débute sur un ton de prière. L’anaphore « mon frère » ressemble à une incantation. Elle se transforme en « mon pauvre frère » (V.4) comme si le poète éprouvait de l’empathie pour le renégat, le plaignait. Il crée ainsi un paradoxe : si le renégat est riche matériellement, il est appauvri par la perte de ses racines. Le vers 6 transforme le ton : « tu nous fais pitié ». Lapidaire, cinglant, il semble couper court aux bavardages vains du Noir dans les salons. Il est plein de mépris. De plus, le passage de la première personne du singulier au « nous » montre que toute une communauté est soudée derrière le poète pour condamner l’attitude du renégat.  Diop dénonce cette acculturation volontaire,  cette acceptation servile de la domination blanche sous prétexte de l’histoire. Pire encore il fustige la bonne conscience du renégat : sous  « (son) front serein de civilisé » (V.8), le renégat, tranquille,  ne voit pas le mal dans son comportement. L’auteur le raille dans sa manière de renier ses origines : origines qui « (font) rougir un visage blanchi ». Piètre image d’un clown mêlant le clown auguste et le clown blanc. Il espère sûrement, en le bousculant ainsi, éveiller sa conscience. La répétition des marques de deuxième personnes (tu – ton – ta), qui le pointent d’un doigt accusateur, est là pour l’interpeller.

Le poète persuadé d’avoir raison, lui prédit même son avenir. Le poème s’achève sur un futur prophétique. La parole poétique se fait châtiment, annonçant celui qui attend le renégat de retour au pays. Ce retour  semble fatal pour celui qui tôt ou tard sera « repu » (V.11), gavé tel un animal sans âme, des mensonges dont il aura peut-être pris conscience. Diop fait surgir une image très visuelle, saisissante par ses détails : l’image de l’apatride, de sa marche laborieuse. Ses épaules semblent alourdies par le poids d’un fardeau : la « caisse » (V.12) qu’il porte. En même temps celle-ci est aussi vide que les mots qu’il a pu entendre et prononcer en Occident. De son exil, il ne rapporte matériellement rien, si ce n’est le poids de la souffrance. Les mots « sonores et vides » (V.12)  se sont convertis en « mots angoissés » (V.14). Le champ lexical de la peur se poursuit avec l’adjectif « inquiète » (V14). Le renégat rentre avec une conscience tourmentée. Il foule une terre qui lui est devenue hostile. La personnification de l’Afrique, « amère » (V.13), suggère qu’elle lui en veut de son abandon. Le « rouge » (V.13)  de son  sol ocre devient symbolique  du désir de vengeance (se venger qu’il ait oublié à ce point que la terre d’Afrique a vu couler beaucoup de sang à cause de l’esclavage et du colonialisme). Le châtiment suprême, c’est la solitude à laquelle il sera exposé, renié à son tour par ceux qu’il aura reniés. Le poème se termine sur les propos supposés du renégat : « Je me sens seul si seul ici !  » (V.15). La répétition de l’adverbe intensif,  la ponctuation forte , (l’allitération en « s ») expriment  la misère de cet homme confronté à la solitude. Le passage du futur au présent souhaite rendre concret, réel ce destin, le lui faire toucher du doigt, avant qu’il ne soit trop tard.

De cette analyse, il ressort que D. Diop fustige les déracinés qui, privilégiant la réussite sociale, s’occidentalisent et perdent leur âme en se laissant naïvement duper par les Blancs qui les méprisent, tout en feignant de les accepter. Reniant leurs origines, ils restent inconsciemment convaincus de leur infériorité et perpétuent ainsi la servilité de leurs ancêtres esclaves. Le poète, assuré de la grandeur de l’Afrique, leur prédit une vengeance terrible de la part de leur terre natale. Il assigne à sa plume la haute mission de libérer les esprits et apporte ainsi sa pierre à l’édifice de la décolonisation. Ce sera chose faite quatre ans plus tard…

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David Diop, « Le Renégat »

David Diop, Coups de Pilon  (1956)

A la suite de l’Antillais Aimé Césaire et du Sénégalais Léopold Sédar Senghor qu’il eut comme professeur, David Diop reprend le concept de « négritude ». Le mot apparaît en 1935, chez Césaire, et renvoie à une prise de conscience de l’identité noire, dans le monde colonial. C’est aussi la revendication d’une appartenance à une culture autre et une condamnation du racisme.

 

Le Renégat

Mon frère aux dents qui brillent sous le compliment hypocrite

 Mon frère aux lunettes d’or

Sur tes yeux rendus bleus par la parole du Maître

Mon pauvre frère au smoking à revers de soie

Piaillant[1] et susurrant[2] et plastronnant[3] dans les salons de la condescendance[4]

Tu nous fais pitié

Le soleil de ton pays n’est plus qu’une ombre

Sur ton front serein de civilisé

Et la case de ta grand-mère

Fait rougir un visage blanchi par les années d’humiliation et de Mea Culpa[5]

Mais lorsque repu de mots sonores et vides

Comme la caisse qui surmonte tes épaules

Tu fouleras la terre amère et rouge d’Afrique

Ces mots angoissés rythmeront alors ta marche inquiète :

Je me sens seul si seul ici !

© Présence Africaine Editions, 2002

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[1] Poussant de petits cris

[2] Murmurant

[3] Se redressant pour se montrer sous son meilleur jour

[4] Attitude polie, teintée de mépris

[5] Mots latins qui signifient « par ma faute ». Lors du rituel de la confession catholique, aveu d’une faute

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Lecture analytique « Cahier d’un retour au pays natal » Aimé Césaire (P.42)

Véronique Perrin

Lycée Voltaire Wingles

Cahier d’un retour au pays natal, Césaire 

 

Introduction :

Aimé Césaire est né en 1913, à Basse-Pointe, à la Martinique, dans une famille de sept enfants, qui ne connaît pas la misère. Après de brillantes études, il obtient une bourse pour venir à Paris. Il quitte avec plaisir son île,  jugeant négativement son peuple servile,  qui, selon lui, a perdu toute dignité, tout sentiment de grandeur.  Arrivé à Paris, en 1931, il y rencontre, au lycée Louis-le-Grand, Léopold Sédar Senghor, qui lui fait découvrir l’Afrique, le réconciliant avec les racines de sa culture. Entré à l’Ecole Normale Supérieure en 1935, il fonde avec Damas et Senghor le journal l’Étudiant noir, dans lequel se forgera peu à peu le concept de négritude, en réaction à l’oppression du système colonial. Poète, dramaturge et homme politique, il a joué un rôle considérable dans la prise de conscience des intellectuels noirs d’Afrique et des Caraïbes.  Césaire est mort à Fort-de-France en 2008.

Cahier d’un retour au pays natal, commencé en 1936 et publié en 1939, à l’occasion de son retour en Martinique, puis intégralement en 1947,  deviendra l’étendard de la jeunesse révolutionnaire des pays colonisés.

 

Problématiques quel vibrant appel Césaire  lance-t-il  dans ce texte ? En quoi  défendre la cause de son peuple permet-il au poète de promouvoir des ambitions humanistes ? En quoi chant poétique et action politique convergent-ils vers un projet humaniste ?

I.                   L’homme d’une cause

1.      Communion avec son peuple

–          Dans cet extrait, Césaire réaffirme son lien avec sa terre natale. Elle est présente par cette ville (V.3) mais celle-ci est une métonymie et le poète insiste surtout sur  la relation affective qui le  soude à son peuple : l’amant de cet unique peuple (V.7) ; de cette unique race (V.24) (V.27).  Il se consacre à sa cause, à laquelle il « se cantonne » (V.24) ;  vous savez pourtant mon amour tyrannique (P.25) suggèrerait presque l’idée d’une relation passionnelle,  jalouse et donc exclusive. D’ailleurs il rejette l’image du « mari » au profit de celle de « l’amant » (V.10).

–          Peuple et terre se confondent : son génie (V.11),  son sang (V.13) personnifient-ils la terre ?… A l’inverse, la race doit produire de son intimité close / la succulence des fruits. (V.32/33), comme une terre fertile qui enfanterait,  de son intimité close , tel un sexe féminin, la douceur de vivre. L’image poétique est très sensuelle. Elle n’est pas qu’un simple ornement ; elle suggère le lien consubstantiel des hommes au monde. Point commun avec le texte de Cù Huy Cân.

–          La présence des éléments est très concrète : les déictiques cette ville, cette unique race,  cet unique peuple leur confèrent matérialité et proximité.  Mais l’évocation de sa terre natale reste imprécise, sans couleur locale : tout comme le poète vietnamien précédemment cité, Césaire veut célébrer une communion avec la nature, il veut restituer l’unité existant entre lui et le monde.

2.      L’universalité

–           Césaire communie avec la nature et avec le genre humain.

–           Le colonialisme est là, en filigrane : par  le mot ressentiment (V.14) : son île a des comptes à régler. Mais Césaire refuse de s’enfermer dans la loi du Talion : ne faites point de moi cet homme de haine pour qui je n’ai que haine (V.22) Son amour pour le genre humain va au-delà : vous savez que ce n’est point par haine des autres races / que je m’exige bêcheur de cette unique race (V.26) Défendre la cause d’un peuple opprimé solidarise avec tous les autres peuples opprimés, mais pas seulement : Il œuvre pour la faim universelle / pour la soif universelle (V.28/29)  En rétablissant la dignité humaine, il redonne ses lettres de noblesse à la notion d’homme.

–          La finalité de ce combat est la liberté : libre enfin (V.30) L’adverbe « enfin » affirme que c’est l’objectif à atteindre. L’intimité close (V.31)  suggère une  terre qui échappe au viol de l’occupant et qui vit en autosuffisance, produisant la succulence des fruits. (V.32)  Libérer son peuple ; libérer tous les peuples opprimés ; libérer le genre humain.

–          C’est un vibrant appel à la fraternité :  Césaire se conçoit comme le frère (V.9).

 

La mission  du poète

1.    Un poème de lutte

–          Césaire fait preuve d’une grande détermination :  il refuse de se laisser détourner de sa mission par quelque réaction que ce soit :  ni les rires ni les cris (V.1).  Tout comme le préconise Hugo, dans « Fonction du poète », celui-ci doit rester indifférent aux réactions qu’il suscite, qu’on l’insulte ou qu’on le loue. Les rires  de raillerie, les cris de souffrance ou de menace ( ?) n’y feront rien. Dans son texte, Césaire affirme sa volonté explicitement : ce que  je veux (V.27), c’est  sommer (V.30) sa race de produire. Il est paradoxal de vouloir la  libérer  (libre enfin)  par un amour tyrannique (V.24) : Césaire est prêt à tout pour cet affranchissement, y compris aller contre la volonté même de son peuple, si celui-ci est résigné.

–          Mais il s’impose la même exigence : je ne me dérobe point (V.7) ;  je m’exige bêcheur (V.26). Il est prêt à assumer son rôle de guide, de tête de proue (V.7)

–          Il s’exhorte lui-même pour trouver la force : dans tout l’extrait il apostrophe (son) cœur (V.8) (V.21), siège des sentiments mais aussi du courage (l’étymologie de ce dernier mot provient de « cœur »)  Il interpelle son cœur dans une prière virile (V.1), païenne, donc :  Césaire compte plus sur lui que sur Dieu pour soutenir sa cause.

–          La lutte armée ? la prière  paradoxalement virile souligne que pour Césaire l’engagement est action. Il se dépeint avec une foi sauvage (V.4) ; ses mots trahissent sa pugnacité : Donnez à mon âme la trempe  de l’épée (V.6),  métonymie très classique du combat, où la dureté du fer,  obtenue par la trempe, symbolise la virilité de son possesseur.  L’alliance des termes abstrait (âme) et concret (épée) renforce l’engagement. Le poète ressemble à un héros épique, prêt à se lancer dans une geste glorieuse : faites de moi l’exécuteur de ces œuvres hautes / voici le temps de se ceindre les reins comme un vaillant homme (V.19/20). Une autre métonymie exprime la lutte, celle du poing : comme le poing à l’allongée du bras (V.12)

–          La violence est latente, suggérée par les mots sang (V.13),  ressentiment (V.14), haine (V.21).

2.     La lutte oratoire

–          Mais si Césaire se projette en héros épique, c’est avant tout en héraut de la liberté, qu’il  se fait  porte-parole  Son combat passe par les mots.

–          Des mots qui sonnent comme un chant religieux. Le mot prière débute l’extrait. Selon Edouard Maunik , Césaire est « un prêtre de la révolte ».

–          La poésie de Césaire est incantation. L’extrait débute aussi par  au bout de ce petit matin, qui est repris dans le texte intégral, comme un refrain. Leitmotiv qui le  martèle 29 fois, qui imprime le rythme, lui  donne une cadence . Dans cet extrait, le rythme est  impulsé par les nombreuses anaphores :  donnez-moi ; faites de moi. Elles rappellent une litanie. Césaire psalmodie. Il choisit aussi les mots pour leur sonorité : recueillement/ensemencement (V.17/18)

–          La poésie est musicalité. Chez Césaire, elle rejoint le rythme de l’oralité de la culture noire. Par ailleurs l’usage du vers libre est signe d’affranchissement par rapport aux règles classiques de la culture dominante (celle des colons, dans la langue desquels il s’exprime.). L’écriture poétique est déjà un geste de libération, qui s’accorde à la revendication politique.  Césaire subvertit le langage des colons pour le rapprocher du souffle du rythme africain, donc de ses racines. « Exprimer l’âme noire avec le style nègre en français » comme l’ écrivait Senghor.

III.             Le poète trace l’avenir

Poète visionnaire

–          Césaire se souvient de « Fonction du poète », de Hugo ; il  s’attribue la même mission de prophète : sur cette ville que je prophétise, belle (V.2).

–          Il œuvre pour l’avenir de son peuple (et du genre humain affranchi) : Au bout de ce petit matin (V.1) est une métaphore de l’éveil. C’est l’aurore de la libération.

–          En se voulant bêcheur de cette unique race (V.26), il cultive  pour l’avenir, en véritable homme d’ensemencement (V.18)

–          Du prophète, il adopte la sagesse : Faites moi rebelle à toute vanité, mais docile à son génie  (V. 11) La première partie du vers signale son exigence morale alors que l’antithèse rebelle/docile  accentue la bienveillance ; d’ailleurs, le paradoxe docile (…) comme le poing (V.11/12) marque une sorte de pacifisme.  Faites de moi un homme de recueillement (V.17), ce recueillement paraissant, par sa passivité, antinomique de l’action précédemment étudiée. Dès lors le mot « frère » peut aussi revêtir une connotation plus religieuse.

–          Devenir un homme d’initiation (V.16), n’est-ce pas être un initié ?

2.     Prophète ou simple mortel ?

–          Le verbe « prophétiser » (V.3)  semble faire du poète un élu.

–          Certaines formulations vont même jusqu’à donner l’idée d’un poète se voulant  démiurge : donnez à mes mains puissance de modeler (V.5) L’image, biblique, rappelle la création d’Adam avec de la glaise. L’occurrence du père, du fils (V.9) rappelle la trinité (privée toutefois du saint esprit). En se voulant  à la fois homme de terminaison et homme d’initiation (V.15/16), Césaire semble être le début et la fin, l’Alpha et l’Omega ? C’est vrai qu’il est le Verbe (poétique). Néanmoins ses références religieuses se mêlent à celles, païennes, de son île : la foi sauvage du sorcier (V.4)

–          Pourtant, Césaire réaffirme sans cesse son humanité : cf. l’anaphore lancinante : faites de moi un homme. Certes, quand il  se projette en père, fils, frère, amant unique de cette race (par l’emploi du déterminant défini le) (V.9/10),  il prend une dimension  absolue surhumaine. Mais il ne se projette que dans des rôles très concrets (le père géniteur), par des images elles aussi très concrètes (comme celle de l’agriculture). Il n’y a aucune volonté de sortir de l’enveloppe charnelle : l’homme est amant ; la terre est un gigantesque sexe féminin  (intimité close) L’homme revendique la sensualité de la condition humaine.

Conclusion

–          Poème qui chante l’appartenance à un peuple, à une terre ; qui loue le rapport consubstantiel de l’homme à son milieu , à ses racines.

–          Poème de lutte qui invite à se libérer de toute oppression mais qui prône aussi un esprit de tolérance et d’ouverture à l’Autre.

–          Poème qui rêve d’accorder à l’homme l’omnipotence divine mais seulement pour faire respecter, la dignité de la condition humaine.

–          Poème qui recourt aux mots de l’oppresseur (langue du français) mais qui leur impulse le rythme d’un chant noir, pour mieux le subvertir.

–          Pour Césaire, écrire et agir politiquement vont de paire : « ma poésie et née de mon action » ; « écrire, c’est dans les silences de l’action » (propos figurant dans Le Monde du 17.03.2006)

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  →  « Cahier d’un retour au pays natal », p:42 anthologie 

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Entrer par l’écriture d’invention autour du Journal d’Anne Frank

Ecriture d’invention autour du Journal d’Anne Frank p. 140 

 

Gwenn-Aëlle Geffroy,

Lycée Montebello, Lille

 

 

Niveau : Selon le projet, Seconde, littérature et société ; Première

Objet d’étude, thème du programme : Ecrire pour changer le monde : l’écrivain et les grands débats de société  / La question de l’homme (1ère)

Objectifs généraux du projet : Découvrir le texte d’Anne Frank et lui donner un écho par le biais de l’écriture

1/ Pour lancer la lecture : Vous écrirez une série de phrases commençant par « Pourquoi ? », destinées à montrer l’absurdité de certains comportements ou d’activités humaines.

2/ Après lecture et échanges sur le texte : En tant que lecteur du XXIème siècle, vous écrirez à votre tour une lettre à Anne Frank qui rendra compte de vos impressions de lecture de cet extrait, de vos réactions face à ses propos et de votre réflexion sur l’homme.

Pour accompagner la réflexion et l’écriture, prolongements :

–       « Vous ne serez pas morts en vain ! », Thomas Mann, anthologie p. 163

–       « Nuit et brouillard », Ferrat, anthologie p. 223

–       Extraits de Nuit et brouillard, Alain Resnais