Archives mensuelles : avril 2017

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Promenons-nous dans les textes!

Retour sur l’édition 2017 du concours des « Itinéraires humanistes »

 

Le collège du Pévèle à Orchies en France a reçu le prix d’interprétation

Dans le cadre de la 3ème édition du concours, consacré cette année à l’exploration de « territoires humanistes », les élèves de 3ème de Madame Véronique Caille définissent avec sensibilité leur paysage de lecture, au gré des textes découverts. Ils mettent en lumière, par leurs voix et leurs mots certains des textes de l’anthologie. La pertinence de leurs interprétations leur a valu le prix d’interprétation.

Leur travail, surtout, révèle toute l’importance de ces activités au coeur du cours de français et de la classe : savoir lire et restituer sa lecture à l’écrit comme à l’oral ; manifester sa compréhension et révéler son interprétation d’une oeuvre.

Prenez le temps de prêter l’oreille et d’aiguiser votre regard pour découvrir les productions dont nous souhaitons qu’elles inspirent de futures explorations de l’anthologie des itinéraires humanistes pour notre temps…

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Donner voix à l’humanisme

Retour sur l’édition 2017 du concours des « Itinéraires humanistes »

 

Le lycée Louis Massignon de Bouskoura au Maroc a reçu le Grand prix du jury pour son projet « Mass TalkX »

 

Dans le cadre de la 3ème édition du concours, consacré cette année à l’exploration de « territoires humanistes », les élèves de Première de Madame Sami,  Messieurs Chabaud et Juma, ont prêté leur voix, à la manière des conférences TED, pour défendre leurs idées et donner à voir, à travers elles, le territoire dans lequel ils aimeraient vivre, éclairant leur identité marocaine à la lumière du monde. C’est ce dialogue remarquable entre les textes, les voix et les cultures au service d’une nouvelle vision de l’homme et de l’humanisme qui a été récompensé.

Le travail réalisé prend appui sur une séquence de Lettres consacrée à la question de l’homme dans les genres de l’argumentation du XVIe siècle à nos jours. Plusieurs textes de l’anthologie des itinéraires humanistes ont été lus et étudiés, extraits des oeuvres de : 

  • Tahar Ben Jelloun, Le racisme expliqué à ma fille
  • Fatou Diome, Le Ventre de l’Atlantique
  • Robert Badinter, Discours à l’Assemblée nationale sur l’abolition de la peine de mort
  • Edouard Glissant, Traité du Tout-Monde

Les textes ont été mis en résonance avec des portraits photographiques de Steve Mc Curry, Phil Borges, Manny Librodo, Lisa Kristine et Lee Jeffries. 

Les lectures ont ensuite été réinvesties à l’écrit et les élèves inviter à rédiger un argumentaire, prenant tour à tour la forme du plaidoyer et du réquisitoire pour défendre leur vision de l’homme et du monde. Voici les textes retenus pour le concours, dont vous pourrez apprécier la qualité d’écriture comme le pouvoir de persuasion.

 

 

Enfin, des exercices théâtraux ont été proposés aux élèves, pour comprendre comment prendre possession de l’espace, poser sa voix et son souffle avant qu’ils ne réalisent leur propre conférence.

Le projet réalisé révèle la richesse du travail sur la voix, sur l’oral plus largement, pour donner corps à une lecture et une épaisseur réelle à ses idées. Il révèle surtout combien la littérature est un art vivant, qui se doit d’être incarné, au service d’un certain regard sur l’homme et le monde. Ce sont des textes qui se répondent, qui se nourrissent les uns des autres et qui vivent de nos lectures plurielles. Les élèves du lycée Massignon l’ont parfaitement compris et ils vous livrent une très belle interprétation des textes qu’ils ont retenus.

A vous d’apprécier chacune des performances, et peut-être de vous en inspirer… :

  • En page 2, retrouvez l’argumentaire réalisé à partir du texte de Tahar Ben Jelloun ;
  • En page 3, celui écrit après la lecture de l’extrait du « Ventre de l’Atlantique » de Fatou Diome ;
  • En page 4, prenez part à l’expérience proposée par les lycéens, nourrie des lectures de Primo Lévi, Badriya Al-Bishr, Théodore Adorno, Zlata Flipovic  et René Philombe ;
  • En page 5, suivez le dialogue de deux lycéens développant leur pensée en écho aux textes de Frédéric Lenoir et Claude Lévi-Strauss.
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Une expérience de l’émerveillement

Retour sur l’édition 2017 du concours des « Itinéraires humanistes »

Le lycée Leconte de Lisle de La Réunion a reçu le prix de la création originale

Dans le cadre de la 3ème édition du concours consacré cette année à l’exploration de « territoires humanistes, les élèves de Seconde de Madame Annette Deschamps ont recomposé le monde en en proposant une vision à la fois poétique et sensible, plaçant leurs mots dans les traces laissées par leur lecture du  poème  de Cù Huy Cân, Empreinte fossile d’une feuille (Anthologie des itinéraires humanistes, p. 37). La créativité dont les élèves ont fait preuve, l’originalité de leur écriture et l’expérience de l’émerveillement qu’elle révèle leur a valu le prix la création originale. 

Nous vous proposons de suivre la genèse du projet avant de mener votre propre expérience de l’émerveillement à la lecture de leurs poèmes.

Avant d’écrire, on s’émerveille. En écrivant, on s’émerveille toujours. Sinon, ce n’est pas la peine de commencer.

Pour penser le rapport entre la poésie et la prose, et l’émerveillement, il ne suffit pas d’étudier la présence de l’émerveillement dans l’oeuvre de tel ou tel écrivain, ni même, sans aller plus loin, sa façon particulière de s’émerveiller. Il faut se placer au coeur de la question et demander pourquoi écrire et s’émerveiller vont ensemble.  […] L’oeuvre littéraire n’exprime pas seulement un émerveillement qui a déjà été ressenti. Elle le cherche, lui permet d’être plus pleinement, le change et, dans une certaine mesure, le créé. En le disant, elle ajoute, à l’émerveillement devant le monde, la merveille d’une langue.  […] Le lecteur aussi, en ouvrant le livre, en passant le seuil d’un premier vers, se promet -sans prononcer le mot et en cherchant toute une variété d’autres choses- de s’émerveiller. L’émerveillement est une des raisons d’être de la littérature, une des raisons pour laquelle elle existe.

Michael Edwards, De l’émerveillement, 2008.

 

Les propos de Michael Edwards rendent bien compte de l’esprit du projet imaginé par Annette Deschamps qu’elle a conduit ensuite pendant 6 séances d’A.P. avec ses élèves de Seconde. 

Comment en effet lire et enseigner la poésie? Comment parvenir à faire de cette lecture une expérience de la sensibilité, (sans quoi l’écriture perd sa raison d’être)? Comment interroger le sens du poème sans le dévoyer ni le restreindre?

Autant de questions, aussi fondamentales que difficiles, auxquelles l’enseignante a choisi de répondre en amenant ses élèves à faire l’expérience de l’émerveillement à travers la construction progressive de délicates images poétiques, qui, comme l’a écrit Philippe Jaccottet dans son recueil Paysages avec figures absentes, constituent avant tout « des directions. Car ces choses, ce paysage, ne se costument jamais. Les images ne doivent pas se substituer aux choses, mais montrer comment elles s’ouvrent, comment nous entrons dedans. » 

Dans les deux pages qui suivent, découvrez le projet et laissez-vous émerveiller….

  • En page 2, retrouvez le descriptif de la séquence menée, accompagnée des travaux préparatoires des élèves  ;
  • En page 3, appréciez les écrits poétiques des élèves, dans un recueil numérique intitulé « Dans les ors du monde, dans les traces fossiles du poème de Cù Huy Cân »
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Chanter l’humanisme, « Humana »

Retour sur le concours 2017 des « Itinéraires humanistes »…

Le Grand Lycée franco-libanais a reçu le prix spécial du jury

Dans le cadre du concours 2017 des Itinéraires humanistes, consacré cette année à l’exploration de « territoires humanistes », les élèves de Première S/L du Grand Lycée franco-libanais, sous la direction de leurs professeurs  Maya Ghanem et Zéna Sabbagh,  ont en effet été récompensés pour leur remarquable travail ayant abouti à la réalisation d’une comédie musicale : HUMANA.

  • Genèse du projet : 

Le projet est né, suite à la lecture de l’oeuvre de Sylvain Germain,  A la table des hommes  et à la rencontre de son auteur. Dans le roman, il est question du rapport de l’humain à l’animal et du mal dont l’homme est porteur face à la sagesse et l’innocence de la nature, ainsi que l’auteure le présente elle-même, dans une des nombreuses interviews données :


 

Une lecture complémentaire d’un texte de l’anthologie, extrait du livre de Vatanen d’Arto Paasilinna a été proposée aux élèves afin qu’ils nourrissent leur sensibilité et leur jugement des résonances entre les deux oeuvres. Il s’est agi en effet de leur faire prendre conscience  de la nécessité d’un retour immédiat aux valeurs de la nature, de l’urgence de faire advenir un nouvel humanisme interrogeant le rapport que  l’homme entretient avec la nature et à la terre. 

  • Nature du projet :

Comment conduire les hommes à comprendre que la Nature peut les guérir de leurs maux?

A cette question, élèves comme professeurs ont choisi de répondre en rédigeant un remarquable écrit d’invention : le livret d’une comédie musicale. Les lycéens ont exploité leurs lectures pour créer leur oeuvre. Ils ont développé une véritable posture d’auteur, choisissant d’adresser leur texte aux plus jeunes d’entre nous, mais finalement à nous tous, en multipliant à cet égard les références aux contes, à la fable et plus largement à l’apologue.

Le projet final d’écriture révèle combien l’écriture d’invention gagne à se nourrir de lectures nombreuses et variées,  combien l’acte d’écrire est aussi acte de lire.

 

On n’écrirait rien si on ne procédait pas à une lecture continue du monde -lecture qui brasse les cinq sens, qui scrute le banal autant que l’exceptionnel, observe pareillement le beau et le laid, le bon et le mauvais, se penche sur l’énigme du bien autant que sur celle du mal (car, au fond, aucun des deux ne « va de soi ») ; lecture plurielle, zigzagante, radicante et proliférante. Lecture vivace, qui est un processus d’interprétation  intellectuelle et affective du monde.

Sylvie Germain,  Les personnages, 2004, chapitre 10.

Le projet souligne également la richesse du dialogue entre les disciplines, au service d’une pédagogie de projet porteuse de sens pour les élèves et riche d’apprentissage en termes de connaissances et de compétences.

Soulignons en effet combien ce projet, croisant les lettres, l’art de la mise en scène, le chant et la musique,  contribue,  à rendre vivante la littérature tout en développant la capacité des élèves à collaborer, négocier et à développer leur esprit critique. Bref, à être humain.

A vous de le découvrir!

  • La bande-annonce tout d’abord :

  • Et le livret, téléchargeable ici :

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Un itinéraire humaniste , Serge et Beate Klarsfeld

Retour sur le concours 2017 des « Itinéraires Humanistes »…

Le lycée Victor Hugo de Florence a reçu le prix de l’engagement

Dans le cadre de la 3ème édition du concours  des Itinéraires humanistes, consacré cette année à l’exploration de « Territoires Humanistes « , les élèves de Première L du lycée Victor Hugo de Florence ont en effet été récompensés pour leur remarquable travail, sous la direction de leur professeur de français, Sophie-Bernard Léger.

Après la lecture de  Si c’est un homme  (Itinéraires Humanistes pour notre temps, p. 238), récit dans lequel Primo Levi  relate son expérience de la déportation, les élèves ont eu la curiosité de demander à Serge et Beate Klarsfeld, dans le cadre d’un atelier de philosophie animé par Bernard Léger, d’expliquer et de revenir sur leur parcours de « chasseurs de nazis ».

Ils parviennent, dans cette passionnante aventure, à saisir les ressorts et le profond engagement  qui continue à  animer le couple, et à mettre au jour le territoire humaniste qu’ils ont créé et qu’ils invitent chacun de nous à explorer.

Vous apprécierez la qualité de la réflexion et la pertinence de leurs questions faisant de cette interview un saisissant  témoignage.

Nous avons le plaisir de vous la faire découvrir, soit en cliquant ici, soit en en feuilletant les pages qui suivent.

 Excellente lecture à tous!

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Des mots pour produire une lecture sensible de l’incipit du « Rapport de Brodeck »

Retour sur le concours 2017 des « Itinéraires humanistes »…

Entrer dans Le rapport de Brodeck , l’explorer , en produire une interprétation , en faire son territoire, c’est l’itinéraire qu’a choisi d’emprunter la classe de 1ère S3 de Véronique Perrin. Les élèves sont partis des mots et ont convoqué à travers eux les valeurs humanistes pour nous révéler leur vision du monde. 

Ce projet a remporté à l’unanimité le grand prix du jury du concours des Itinéraires humanistes 2017.

Telle en est la description, faite le professeur :
L’incipit en constitue la frontière, une sorte de sas qui nous permet de nous extraire de notre réalité pour nous faire basculer dans la fiction. Chaque élève s’en est approprié un mot, telle une boussole orientant la lecture complète de l’œuvre. Il a ainsi voyagé à la rencontre de l’Autre, l’Anderer, Brodeck et des Autres, car le roman constitue un véritable territoire humaniste.
La classe vous convie à sillonner cette première page en vous dévoilant divers parcours possibles pour pénétrer plus avant dans l’univers de Claudel. Elle s’excuse d’ores et déjà des redites mais les routes ne sont-elles pas faites pour se croiser ? Chaque élève a butiné dans ses souvenirs de lecture pour traduire « la couleur » du roman . Il a souhaité faire partager son expérience sensible de lecteur, tentant de privilégier le rendu de l’atmosphère sur le suspense. Bonne promenade!

Guidés par Madame Perrin, les élèves ont en effet sélectionné les mots qu’ils ont jugés les plus frappants, à partir desquels ils ont produit de nouveaux écrits venant enrichir à leur tour le texte premier de l’auteur.  C’est donc une double entrée dans l’oeuvre, par le lexique et par l’écriture, que la classe a réalisée.

Les mots sélectionnés dans l’incipit par les élèves sont les suivants. Vous pouvez cliquer sur chacun d’eux pour découvrir les productions réalisées en lien.

Je m’appelle  Les autres  De Anderer 
Brodeck  Forcé  l’Autre 
Je n’y suis pour rien  Ils  Différent 
Je tiens à le dire  Etudes  La vérité ;  Variations 
Ligoter  Souvenir  La guerre 
Ma mémoire  Machine  Notre Village 

Accéder à l’intégralité du travail 

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Habiter l’espace intime de Brodeck

Retour sur le concours 2017 des                          Itinéraires humanistes…                               

Le lycée de Wingles a reçu le Grand Prix du jury        

Dans le cadre du concours 2017 des « Itinéraires humanistes », consacré cette année à l’exploration de « territoires humanistes », les élèves de Première S3 de Madame Véronique Perrin ont produit une passionnante lecture hypermédiatique de l’incipit du Rapport de Brodeck de Philippe Claudel (Itinéraires humanistes, p.153). A la faveur de la création d’hyperliens,  ils ont forgé leurs propres territoires de lecture et vous invitent à créer le vôtre tout en renouvelant notre pensée sur l’homme et le monde.  A découvrir absolument!

Madame Véronique Perrin présent ainsi le projet :

L’incipit en constitue la frontière, une sorte de sas qui nous permet de nous extraire de notre réalité pour nous faire basculer dans la fiction. Chaque élève s’en est approprié un mot, telle une boussole orientant la lecture complète de l’œuvre. Il a ainsi voyagé à la rencontre de l’Autre, l’Anderer, Brodeck et des Autres, car le roman constitue un véritable territoire humaniste.
La classe vous convie à sillonner cette première page en vous dévoilant divers parcours possibles pour pénétrer plus avant dans l’univers de Claudel. Elle s’excuse d’ores et déjà des redites mais les routes ne sont-elles pas faites pour se croiser ? Chaque élève a butiné dans ses souvenirs de lecture pour traduire « la couleur » du roman . Il a souhaité faire partager son expérience sensible de lecteur, tentant de privilégier le rendu de l’atmosphère sur le suspense. 

A l’origine du projet, il y a cette question que tout professeur et élève se posent : 

Comment entrer dans une oeuvre?  Comment s’en emparer ?

La formidable inventivité du projet, sa remarquable pertinence aussi, résident précisément dans le fait d’avoir amené les élèves à pénétrer au coeur du texte et de s’être emparé de ses mots avant de transformer ces derniers en hyperliens, support d’une expérience unique de lecture.

Car c’est bien de cela dont il s’agit : une expérience inédite, à travers laquelle chacun est invité à construire son propre itinéraire de lecture en fonction des hyperliens qu’il choisit d’activer ou non. Laissez-vous prendre dans ce plaisir de lecture, prenez le temps de lire tout autant que de voir ce texte s’enrichir pour renouveler votre manière d’apprécier l’oeuvre de Claudel. Eprouvez cette « part sensible du sens du texte numérique¹ » à la faveur d’une implication nouvelle du corps dans l’acte de lecture. Acceptez surtout de « prendre le risque de la manipulation pour savoir si l’autre texte existe² » et vivez une « expérience temporelle² » et humaniste unique!

1- Nous faisons nôtre ici une réflexion, extraite de l’essai de Alexandra Saemmer, Rhétorique du texte numérique : figures de la lecture, anticipations de pratiques,  Presses de l’ENSSIB, col. Papiers, 2015, p. 45.

2- op. cit., p. 23.


 Nous vous proposons deux manières d’apprécier le projet et peut-être de vous en emparer pour construire vous aussi, à l’occasion de nouvelles lectures, des territoires humanistes inédits :   

  • La première consiste en une totale recréation du texte au sein de l’espace numérique. Celui-ci a en effet été réécrit,  enrichi et rendu accessible sur un site web, crée grâce à la plateforme « Wix ». 
  • La seconde consiste en une réécriture du texte à l’aide d’un traitement de texte  en y insérant des hyperliens.

A vous ainsi de choisir la forme que vous retiendriez pour vos propres travaux, en fonction de vos conditions d’exercices et des moyens à votre disposition.

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Village

Des centaines de templates

« L’unique morale qui prévaut, c’est la vie. Seuls les morts ont toujours tort. »

   Nous sommes dans un jardin, plein été, bouquet de lavande près du cerisier, les Rex flammae l’ont envahi. Ils sont une vingtaine à y vivre, ces lépidoptères vivent en harmonie.

   Un jour, un papillon tout à fait différent arriva dans le jardin, ses ailes étaient très sombres, se rapprochant du noir tandis que celles des Rex flammae étaient d’un rouge foncé étincelant. Mais les Rex flammae l’acceptèrent non comme l’un des leurs mais plutôt comme un visiteur sans trop de lien avec eux. Les jours passèrent et le papillon noir était toujours là, il se fondait presque dans la masse. Les mâles Rex flammae dirigeaient le clan, c’était eux qui prenaient les décisions protégeant le groupe. Si les Rex flammae devaient se cacher, c’était eux qui donnaient l’alerte ; s’ils changeaient de lieu de vie, c’étaient encore eux qui le décidaient. Mais impossible de quitter le bouquet de lavande, chaque papillon étant très attaché à ses origines. Un lien presque surnaturel soudait la communauté de l’espèce. Etant très peu nombreux, ils se connaissaient tous, ainsi que leurs origines. Sauf ce papillon noir : aucun lien avec les Rex flammae, personne ne sait de quel jardin il vient, quels problèmes lui sont arrivés pour qu’il vienne dans la lavande, sans communiquer les Rex flammae. Il y a des bouquets de lavande dans chaque jardin des environs, alors pourquoi celui-ci ?

Un jour changea littéralement le village lorsqu’un aigle fut repéré non loin du jardin. Le conseil des papillons se réunit alors :

   « Vous savez, dit le chef, un habitant de la lavande va être obligé de mourir, il faut donc choisir ce papillon.

Je pense que le choix semble clair pour chacun d’entre vous : soit un papillon que vousconnaissez depuis votre temps de chenille, avec lequel vous avez tout partagé, soit un papillon étranger au village, sans aucun lien avec vous, dont vous ne connaissez rien. Alors, quel est votre choix ?

Les Rex flammae doivent être préservés, ce n’est pas très moral pour ce papillon noir mais rien n’est plus moral que la vie des nôtres. Votons. »

   Le jour de l’attaque de l’aigle, tous les Rex flammae étaient prévenus sauf le papillon noir qui fut avalé en une seule bouchée. L’équilibre des papillons Rex flammae était donc préservé.

Le Rapport de Brodeck, éd. Livre de poche (P.276)

Martin Rose

Espace intime de Brodeck                                         ⇒Quels mots pour entrer dans le Procès?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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La guerre

Cette satanée guerre, quel dégât n’a-t-elle pas causé dans ce village ! D’ailleurs notre histoire est rythmée par la guerre, notre monde,  aujourd’hui,  résulte des conséquences de celles-ci. Tout le monde. Tout le monde en est responsable, elle est là, elle est présente, et cela depuis très longtemps. Malheureusement, malgré les moyens dont nous disposons aujourd’hui, personne n’a le pouvoir d’arrêter son éternel recommencement. Elle a existé, elle existe et elle existera. Quand j’entends ce mot, je fais référence aux deux conflits mondiaux que j’ai moi-même vécus et qui causèrent la mort de plus de soixante millions de soldats, d’hommes, de femmes, d’innocents.

    Dans ce carnet, je tiens à consigner l’histoire du village où je me trouve en ce moment, même si je crains que personne ne le lise un jour. Quand j’arrivai dans ce village, quelques mois après le conflit, je sentis une certaine froideur chez les habitants. Là, les gens me fixent du regard quand je marche dans la rue. Une fois, j’ai même entendu mon propre nom, prononcé par un des villageois. Peut-être suis-je en train de devenir fou me direz-vous, peut-être disait-il du bien de moi, mais je ne pense pas. Au fond, dans ce village, comme dans de nombreux autres à l’époque où nous vivons, règne une certaine haine de l’étranger. Cette xénophobie a notamment été renforcée par tous les crimes de guerre que les villageois ont dû vivre pendant ses six années de calvaire, par exemple de la part des Fratergekeime qui ont fait prisonniers de nombreuses personnes ou encore ont pillé ce village de fond en comble dans l’espoir de se réapprovisionner. Ou même par les habitants eux-mêmes qui étaient prêts à vendre leur voisin à l’ennemi dans le seul but de survivre. Puis, quand je parle de prisonnier de guerre, je parle surtout des camps de concentration. D’ailleurs, dans ce village, je connais une personne ayant subi ce calvaire, il se nomme Brodeck. Quelles souffrances n’a-t-il pas endurées quand on sait les malheurs qu’ont vécus les prisonniers à l’époque. Il a sûrement été maltraité par les  serviteurs d’Hitler. Je n’ose même pas imaginer. Ce que je sais aussi, c’est que la femme de Brodeck nommée Emélia est restée muette, elle chantonne, mais ne parle plus. Elle a perdu la raison quand la guerre a pris fin. A-t-elle été marquée par la disparition de son mari ? A-t-elle subi des horreurs de la part des Fratergekeime ? Ici tout le monde sait, je le sais…

    Pour le moment, je retourne peindre, c’est plus fort que moi, je n’arrive pas à m’arrêter, c’est comme s’il y avait quelque chose en moi qui m’empêchait d’abandonner. Saurai-je un jour pourquoi ?

Jimmy Pawlowski

Espace intime de Brodeck                            ⇔Quels mots pour entrer dans le Procès ?

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Vérité : Variations

« Que voulez-vous de moi ? Raconter la vérité ou votre vérité ? Votre vérité n’est peut-être pas la même que d’autres, demander le pardon en mentant ne servira pas. Je ne veux pas être le bouc émissaire. Ce n’est pas parce qu’ils me croiront que votre vérité sera conforme à leurs attentes. Je ne veux pas que vos idées soient de votre imagination et qu’il en sorte un mensonge. Si je dois le faire, je ne veux que la vérité. Etes-vous sûrs que vous, vous y teniez ? Alors quelle est votre vérité ? Pourquoi cet acte était-il une nécessité ? Le rapport sera basé sur vos témoignages et ma propre enquête si bien que la vérité sera toujours difficile à distinguer du mensonge même si elle est pourtant raisonnable enfin… si elle existe ici. Pourquoi avez-vous tant besoin de pardon si c’était une nécessité ? La vérité est que vous voulez qu’on vous pardonne pour avoir la conscience tranquille alors que cet acte était prémédité. Vous avez peur, voilà tout. La vérité peut couper les mains. Pour pouvoir faire de mon mieux, il faut que je sache si vous voulez établir la vérité ou vous faire croire ? »

Sarah Blanchard

    » Chers villageois, c’est le moment de vous quitter mais il y a une chose dont je dois vous faire part.

   Vous m’avez demandé de rédiger un rapport sur la mort de l’Anderer, afin de ne pas vous sentir coupables de son meurtre. J’ai cependant des doutes sur les circonstances et sur la raison pour laquelle il a été tué. Au tout début de mon enquête, je me suis rendu chez le maire afin d’en savoir un peu plus. Quand il m’a servi une tranche de lard, je regardais son couteau, ce couteau qui lui servait le plus naturellement du monde, ce matin-là, à se nourrir et qui la veille au soir s’était sans doute planté à plusieurs reprises dans le corps de l’Anderer. Puis je lui ai demandé de voir le corps et celui-ci m’a clairement fait comprendre qu’il n’y en avait plus, ce qui a renforcé mes soupçons .

    Quand j’avais enfin fini de rédiger ce rapport, je suis allé le porter tôt le matin chez lui. Et celui-ci l’a lu avec la plus grande attention et s’est mis à tourner autour de la table tout en marchant lentement en me racontant une histoire de moutons.  J’avais compris : c’était Orschwir le berger et vous les moutons.  Le troupeau a besoin de son berger afin d’assurer la cohésion du groupe mais jusqu’à quel point ? Après ces paroles, il s’est rapproché du poêle où de grandes flammes réchauffèrent toute la pièce, il ouvrit la trappe et jeta le rapport dans le feu ne me disant : « il est  temps de tout oublier, Brodeck. Les hommes ont besoin d’oubli. »  Maintenant que vous connaissez toute l’histoire, il est temps que je parte et que je vous chasse de ma mémoire à tout jamais. « 

Brodeck

Charlotte Tiberghien

Espace intime de Brodeck                                ⇒ Quels mots pour entrer dans le procès?

 

 

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Vérité

 

Je ne peux y croire. Comment peut-il brûler autant de travail en si peu de temps ? J’aurais dû me douter que cette version de l’Ereigniës ne lui plairait pas. Le maire, il n’aime pas voir la vérité en face. La vérité, ça peut couper les mains et laisser des entailles à ne plus pouvoir vivre avec, je l’ai déjà dit. Ce qu’Orschwir veut, c’est garder, en apparence, les mains vierges de tout vice. Après tout, peut-être que la vérité n’est pas bonne à dire. Mais il fallait que je le dénonce, ce meurtre ! J’ai été forcé de faire ce rapport, ils voulaient tous que ce soit moi, ils voulaient que je raconte. Je pensais avoir raconté la vérité, mais personne ici ne l’aime la vérité. J’en ai pris conscience pendant le repas qu’avant organisé l’Anderer. Il avait alors exposé les tableaux qu’il avait réalisés, révélant le vrai visage de chacun d’entre nous et ils n’avaient pas accepté d’être confrontés à la réalité. Je me rappelle bien qu’ils ont tout saccagé. Personne n’aime la vérité ici.

    Quand je suis allé chez Orschwir pour lui poser des questions, il a refusé de me répondre et s’est contenté de me montrer ses porcs. Sur le moment, je n’ ai pas prêté attention à l’enchaînement des événements mais quand j’ai demandé à voir le corps, il m’a emmené à la porcherie. Le corps s’y trouvait-il ? J’en ai la quasi certitude désormais. Il a brûlé le rapport car quelque chose le dérangeait : la vérité.

     Comme Diodème et la lettre qu’il m’a laissée, j’ai voulu dénoncer la vérité, aussi effrayante soit-elle.  Le fameux soir où je suis venu chercher le beurre, les villageois m’ont fait l’avocat du diable et je devais de rendre ce rapport. J’ai donc choisi d’expliquer ma version des faits. J’étais arrivé à l’auberge Schloss peu après que l’Anderer ait été traversé de plusieurs coups de couteau. Ensuite le corps a été emmené dans  l’enclos des porcs puis réduit à néant, faisant oublier ce qui était arrivé. J’ai écrit le rapport, entre deux paniers garnis que je recevais en guise de paiement puis Orschwir a fini par le brûler puisque ce n’était pas le genre de « vérité » qu’il voulait lire.

    Je sais que la vérité peut faire souffrir, j’en ai fait l’expérience par les lettres de Diodème mais elle reste toujours enfouie dans la mémoire de quelqu’un et tôt ou tard elle finit par ressurgir : elle ne reste jamais éternellement muette.

Noémie Neveu

⇐Espace intime de Brodeck                                        ⇒Quels mots  pour entrer dans Le procès ?

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Différent

                                                        La différence
La différence apporte méfiance
Cet étranger venu de nulle part
Fut assassiné pour sa clairvoyance
Venu pour réanimer la mauvaise conscience,
Venu pour briser les remparts
Venu pour révéler les secrets  enfouis
Venu dans un but divinatoire.
 
Différents, l’étaient-ils face à ces villageois
Il  disait : « c’était un peu moi »,
Mais bien que Brodeck fût des leurs
Il se sentait beaucoup plus proche de l’Anderer.
 
Leurs différences provoquèrent trahison.
« Assassins » criait l’un d’une voix vengeresse,
Son ombre pesant sur les coupables.
Injuste, pensait l’autre envoyé dans les camps
Revenu et faisant partie des seuls survivants,
Ayant cru leur avoir servi de leçon
Mais l’ancienne délation ressurgit de toute façon.
 
Le différend créé par l’exposition de leurs péchés
Montrés grâce à ses peintures extralucides,
Œuvres perçues comme perfides
Conduisit à l’assassinat de l’étranger.
 
Cette différence amenant crainte et haine
Evidence partagée par le monde entier
N’est que redondance de la bêtise humaine.

Benjamin Duplouy

Habiter l’espace intime de Brodeck               ⇔Quels mots pour entrer dans Le Procès?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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L’Autre

 

Discrètement mais sans hasard,  il apparait,Dans ce petit village parmi ces quelques âmes. Malheureusement pour lui il les observera, Malheureusement il constatera, il percevra,  il écrira, et il dessinera.Cet homme « extra-ordinaire » Cet homme qui parle aux animaux mais peu aux hommes Et qui pourtant en perçoit les moindres secrets…

Toi, « l’étranger », « De Anderer », à leurs yeux différent, original, dérangeant.Comme je te comprends pourtant : tes origines te sont reprochéesLes miennes m’ont mené en enfer, l’enfer des camps, des camps de l’indicible. Toi, l’étranger, tu l’es surtout pour ces habitants, à l’étroit dans leur village, à l’étroit dans leur esprit.Jamais ils n’ont comme toi voyagé, jamais ils n’ont connu d’autres contrées, d’autres modes de vie et de pensée.Toi le rêveur, comme moi, tu observes, comme moi tu ressens, tu comprends.J’observe la nature, je l’écoute, je la consigne dans mon carnet. Tu habites leur village, tu leur souris, tu suscites leur intérêt, leurs interrogations, Sans parler, tu révèles leurs défauts, la distance qu’avec toi ils instaurent, par méfiance. Et puis, tu le notes. Toi, l’étranger, tu portes des habits cossus, un chapeau, tu parles à ton âne, ton cheval,Et puis tu bois du thé, dans des tasses de porcelaine d’Asie !Schloss, l’aubergiste, accepte de te loger, surtout par vénalité. Mais tu n’es pas intégré, parce que tu es étrange, étranger !Aux Fratergekeime, ils m’ont livré, pour acheter leur tranquillité, Pour donner à l’ennemi ce qu’il traquait, et ainsi échapper à sa sanction. Toi, le voyageur, tu en as découvert des civilisations ! Tu n’as pas rejeté la nouveauté !Toi, le frère, tu m’as écouté, à toi je me suis confié, avec générosité et sensibilité tu m’as accueilli.Toi, Petit Prince, tu te confies à la nature, à tes animaux, tu flânes le long de la  rivière StaubiLoin de toi, l’avarice, la bêtise, l’intolérance, la méchanceté !Toi, Petit Prince, tu ne demandes pas qu’on te dessine un mouton, mais tu les représenteras, eux les villageois Sur des toiles que chez Schloss tu exposeras. Toi le prophète, par ces peintures tu tenteras de les révéler à eux-mêmesSans les sermonner, tu essaieras de les ouvrir à l’Autre, à la différence Mais tu échoueras et leur bêtise triomphera.D’abord, ils s’en prennent à ce que tu as de plus cher : tes compagnons à quatre pattes. Toi, le prophète, tu deviens fou de douleur, d’incompréhensionEt pour la première fois, tu t’exprimes, tu cries ton désespoir. Toi, le prophète, ils te sacrifient, ils te battent à mort, c’est « l’Ereigniës ».Toi, l’étranger, le frère, le prophète, tu voulais les laver de leurs péchés Mais ils n’ont pas compris, ils sont restés aveugles et t’ont exécuté.Mais moi, Brodeck, je t’ai compris….Et tu rêves, tu penses….

«  La guerre ravage et révèle » –  Philippe Claudel 
« On ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux ». – Saint-Exupéry  
Mathis Tryla

Espace intime de Brodeck                           ⇔ Quels mots pour entrer dans le Procès?

 

 

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L’Anderer

 

Après le massacre de ses animaux, l’Anderer est effondré de tristesse, cet épisode l’a marqué et blessé, les villageois cruels ont réussi à lui faire du mal indirectement en s’en prenant à ses animaux. L’Anderer rentre alors à l’auberge, dans sa chambre, il s’isole du reste du monde, il est abattu, pensif, souffre, pleure en repensant à ses animaux, à ses meilleurs amis. Soudain la colère l’envahit et un désir de vengeance apparaît. Il sort de la poche de son manteau, son carnet noir, l’ouvre et commence à écrire, son écriture est rapide et violente :

    « Aujourd’hui vous voulez me faire souffrir, me détruire une nouvelle fois, cependant cette fois ce sera différent, vous m’avez oublié , moi non, maintenant c’est à moi de vous faire souffrir, je vais vous faire payer ce que vous m’avez fait.  Il  y a maintenant plus de vingt ans, vous m’avez tout pris, lorsque je ne pouvais plus payer mon loyer, le maire Orschwir m’expulsa avec ma femme et mes deux enfants, n’ayant plus de tout où dormir durant cet hiver.  Nous sommes allés voir le curé Peiper pour dormir dans l’église au chaud, cependant il ne nous laissa pas entrer, ensuite dans un dernier espoir et comme je ne savais plus quoi faire, nous allâmes demander une chambre pour passer la nuit à l’Auberge Schloss. Cependant  comme je n’avais pas d’argent, il affirma que toutes les chambres étaient prises, alors que ce n’était pas la pleine saison et qu’il n’y avait jamais personne dans cette auberge pour passer la nuit. J’ai perdu mes deux enfants en passant des nuits dans le froid et ma femme succomba de la grippe et mourut peu de temps après, voilà la raison de ma venue au village, vous allez mourir et je vais détruire vos maisons et vos vies, comme vous avez détruit la mienne. »

    Après avoir lu le passage de la mort des animaux, j’ai imaginé comment l’Anderer aurait pu réagir. Ce personnage étant de nature sage avec les villageois qu’il côtoie  au cours de l’histoire, cet extrait serait une des nombreuses confidences qu’il a écrites dans son carnet noir dans lequel il libèrerait ses pensées sombres telles la souffrance, la colère et son désir de vengeance afin de ne pas laisser paraître sa rage . Je me suis permis en tant que lecteur d’imaginer la vie de l’Anderer avant son arrivée au village et la raison de sa venue. Après tout, Claudel ne l’a-t-il pas rendu énigmatique pour que nous nous appropriions librement son destin…

Allan Thery

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Le palmarès 2017

Voici les résultats!

Prenez le temps de les découvrir et de les apprécier, à la hauteur de l’engagement des classes productrices et des évaluateurs.

Suivez l’itinéraire proposé pour apprécier chaque projet. Quelques secondes peuvent être nécessaires pour que la production s’affiche et que vous puissiez la lire. (En cliquant sur la flèche oblique en bas à droite, vous aurez accès au palmarès en grand écran).

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